Pas en notre nom!

Après « Les enfants volés d’Angleterre »*, c’est le tour des « enfants perdus d’Angleterre »**. L’ignominie y provoque la stupéfaction, l’abjection induit la consternation et la souillure conduit à la honte. Ce que la Grande Bretagne fait vivre à certains de ses enfants atteint des sommets dans l’insoutenable. Le « Children act », voté en 1989, permet de retirer un enfant à sa famille, au moindre soupçon d’une « probabilité future de faire du mal ». Un délai de trois mois est donné aux parents pour prouver qu’ils ne seront pas maltraitants. S’ils n’y arrivent pas, leurs enfants sont donnés irrévocablement à l’adoption. Des agences privées sont chargées de ce business, si juteux que certaines d’entre elles sont cotées en bourse ! Depuis cette loi inique, la situation s’est encore aggravée. A partir de 1997, chaque collectivité locale doit respecter des quotas d’adoptions, sous peine de restriction de budget ! Quant aux mineurs non adoptés, ils sont placés dans des foyers sous-équipés et sous encadrés. Avec des tarifs allant jusqu’à 3 200 euros par semaine, c’est une bonne affaire pour les 70 % d’entre eux gérés par des grands groupes privés. Si les enfants sont déscolarisés en grand nombre, les écoles refusant de les accueillir, ils sont parfois la proie de prédateurs sexuels qui les exploitent sans que les services sociaux et la police ne se sentent concernés. Trop, c’est trop ! C’est un cauchemar. On va se réveiller ! La perfide Albion va crier à la calomnie … mais non, le silence. Pas étonnant : ces affaires sont tenues au secret, toute révélation publique étant punie de prison. Ce pays est-il devenu complètement fou ? Ou est-ce là le résultat d’un libéralisme confiant l’action sociale au secteur lucratif ? S’agit-il d’un eugénisme visant à éliminer la descendance des plus pauvres ? Quelle que soient les réponses possibles, cette flétrissure ne relève ni du travail social ni de la protection de l’enfance, mais des ténèbres et de la monstruosité.  

* réalisé en 2016 par Isabelle Cottenceau et présenté sur France 5
** réalisé en 2019 par Stéphanie Thomas et Pierre Chassagnieux et présenté sur France 5
 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1252 ■ 28/05/2019