Les responsabilités en travail social

Pierre VERDIER, Jean-Pierre ROSENCZVEIG, Dunod/Edition Jeunesse et Droit (16 passage Gatbois 75012 Paris), 1998, 335 p.


Pendant longtemps, celles et ceux qui se dévouaient pour l’intérêt général ont été intouchables. L’action sociale empreinte de charité durant des siècles respectait ce principe. La professionnalisation progressive de ce secteur s’est accompagnée de l’obligation d’avoir à rendre compte des actes posés comme tous les autres citoyens. Face à une évolution générale du droit qui cherche à trouver un responsable à tout ce qui advient, la tentation a été forte d’“ ouvrir le parapluie ”. D’où l’intérêt de cet ouvrage conçu grâce aux nombreuses conférences tenues par leurs auteurs à travers toute la France et fort judicieusement organisé pour répondre aux interrogations des professionnels. Les 114 questions qui y sont posées trouvent ainsi des réponses cohérentes. Cela part d’abord du plus général : “ qu’appelle-t-on la responsabilité civile ? ” ou encore “ quelles sont les règles générales du procès pénal ”, aux plus particulier : “ peut-on rechercher la responsabilité de l’Etat en cas de mauvaise orientation de la part de la CDES ? ”, “ un directeur de service de la PJJ est-il civilement responsable pour le mineur confié à son institution ? ” ou encore “ un éducateur peut-il être pénalement responsable en cas de fugue du mineur ? ”. Ce souci de clarification permet de replacer l’activité socio-éducative dans toute son ampleur, mais aussi dans les limites que lui fixe la loi. “ Il faut maintenir cette capacité à prendre des risques (calculés) qui est l’essence de l’action sociale pour débloquer une situation. Improviser une réponse dans un cas non prévu dans les écoles ou les fiches de poste ” (p.21). Pierre Verdier et Jean-Pierre Rosenczveig sont trop fins connaisseurs du travail social pour savoir qu’une réduction à l’extrême des risques possibles signifierait la mort de ces initiatives tantôt tranquilles, tantôt fulgurantes qui pour être parfois à la limite d’une stricte sécurité sont les seules façon d’avancer. Mais un risque calculé doit aussi être assumé. D’où l’importance de resituer la problématique de la responsabilité. Il convient de distinguer clairement entre ce qui relève de l’éthique et qu’on a à gérer face à sa seule conscience et ce qui implique la société. Ainsi parlera-t-on de responsabilité politique (des élus devant leurs électeurs), civile (réparation des dommages causés à autrui), pénale (infractions dont on est coupable) ou disciplinaire (obligations liées au contrat de travail). Autre notion essentielle, celle qui distingue l’obligation de moyen dans l’action éducative qui tente d’apporter autonomie et épanouissement aux usagers et l’obligation de résultat en matière d’information, de prestation hôtelière ou de sécurité. Tout l’intérêt de cet ouvrage est bien finalement de proposer une exploration du droit, pas d’une manière abstraite, mais à partir des situations rencontrées dans le quotidien.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°471 ■ 28/01/1999