Droit pénal des mineurs

Jean-François Renucci, Masson, 1994, 237 p.

Voilà un ouvrage de droit des plus fréquentables. Il est souvent reproché à cette discipline d’être parfois ardue et obscure. Ici, il n’en est rien. Tout au contraire, Jean-François Renucci propose un écrit simple et agréable à lire, à la portée du non-spécialiste. Certes, on ne peut pas être brillant en tout. Quelques perles se repèrent ici et là, notamment en ce qui concerne la criminalité. Des remarques hâtives, voire malheureuses sur « l’influence de l’hérédité n’est pas certaine » (l’auteur n’en est pas vraiment sûr...), « les enfants de divorcés qui délinquent plus facilement » (à partir de quelles statistiques affirme-t-il cela ?) ou encore « les sociétés occidentales sont largement déchristianisées et nul doute que cela constitue un facteur de délinquance ». Mais, dès que François Renucci réintègre son champ de compétence, reconnaissons-lui les grandes qualités de son travail. Le livre est divisé en deux parties: « le mineur victime d’une infraction » et « le mineur auteur d’une infraction ». Au-delà de l’explication de texte, on y trouve présentation historique, comparaisons internationales, ainsi qu’une articulation entre ancien texte et nouveau texte du code pénal ainsi que les projets de réformes (notamment concernant l’ordonnance du 2 Février 1945) et évolutions possibles ou souhaitables, le tout commenté de façon très intéressante. Alors que dire de plus sinon, repérer quelques situations de droit qui donneront au lecteur l’envie d’aller plus loin ... L’abandon d’enfant est codifié par la loi qui ne poursuit que le délaissement qui mettrait en danger l’enfant. Cohérent avec la loi de 1989 sur l’enfance maltraitée, le législateur a introduit le concept de « mise en péril du mineur » qui englobe d’anciennes et de nouvelles incriminations portant atteinte à la santé, la sécurité et la moralité de celui-ci. Le délit de non-présentation d’enfant dans le cadre du droit de garde quant à lui est constitué, même en cas de résistance du mineur, le prévenu étant réputé user de son influence et de son autorité afin que soit respectée la décision de justice. Seules la preuve de ses efforts loyaux ou la situation particulière de l’adolescent refusant une stricte obéissance peuvent tempérer le point-de-vue des juges. Le droit pénal des mineurs s’adresse aussi à ceux qui transgressent la loi. Ces infractions sont, dans la quasi-totalité des cas, des atteintes aux biens (et non pas aux personnes). Le livre rappelle l’accent mis depuis l’ordonnance du 2 février 1945 sur la personnalité du jeune plus que sur la gravité de son acte. La logique répressive n’est pas absente, même si elle est conditionnée par la présomption de responsabilité et la notion de pleine possession du libre-arbitre. Les institutions sont présentées elles aussi. Au passage, l’auteur déplore que la fonction de Juge des Enfants ne réponde pas aux conseils d’une circulaire de 1951. Il était conseillé qu’il soit désigné sur la base de réelles aptitudes. De fait, c’est le premier poste au sortir de l’Ecole Nationale de la Magistrature, choisi souvent en fonction du classement de fin d’étude ou d’impératifs géographiques plus qu’à partir de réelles motivations.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°341 ■ 21/02/1996