Handistar 2008 - Carentoir (56)

Scène ouverte aux manifestations artistiques issues du monde du handicap, le festival Handistar propose début juillet sa huitième édition.

Dans la mouvance des lois de 2002 et 2005, une claire volonté politique a été affichée de favoriser l’accès des personnes porteuses de handicap à l’art et à la culture du monde des valides. Les questions d’accessibilité ont même fait l’objet d’une charte préparée par une « Commission nationale Culture-Handicap ». On ne peut bien entendu que se féliciter de ces avancées. Mais, dans le même temps, on ne peut que constater la panne sèche du mouvement inverse : l’accueil par le réseau culturel ordinaire des productions artistiques du monde du handicap. On connaît Pipo Delbono, ce metteur en scène de théâtre italien, qui n’hésita pas à intégrer à sa troupe des acteurs porteurs de déficiences, certains sortant même d’asile psychiatrique. Mais l’exception ne confirme pas la règle. Pourtant, il existe des centaines d’établissements accueillant des adultes porteurs de handicap qui utilisent l’art et la culture comme support d'activité, mêlant le plaisir et l’épanouissement individuel. Mais, au-delà de la traditionnelle représentation devant l’ensemble des résidents et leur famille, il n’y a que bien peu d’occasions de valoriser le travail réalisé. Si la plupart des festivals ont normalisé la pris en compte des publics à besoins spécifiques, aucun n’accueille de spectacles montés par des groupes « différents ». C'est bien ce qui rend précieux une manifestation comme celle du festival Handistars, qui, comme chaque début d'été, ouvrira ses portes les 5 et 6 juillet aux artistes et au public porteur de handicap. C’est l’occasion de présenter le spectacle préparé tout au long de l’année dans son foyer de vie, sa Maison d’Accueil Spécialisé, son l’Institut Médico-Educatif, son association de loisirs adaptés : chants, danse, théâtre, musique, poésie, mime, percussions, arts du cirque se succèdent… Pour les artistes handicapés c’est le grand moment, l’occasion unique de se produire en dehors des murs devant un large public qui mélange celui des établissements, des familles, des proches des artistes et spectateurs handicapés ou visiteur de la « ferme du monde », attraction principale de l’ESAT de Carentoir, organisateur de la manifestation.

L’Afrique à l’honneur

L’édition 2008 s’ouvrira en avant première, le vendredi 4, sur un concert donné par le groupe « Les trompettes du Mozambique ». Comme son nom ne l’indique pas, cet orchestre vient des quatre coins de la Bretagne : ce sont 18 musiciens un peu déjantés et en totale ébullition qui dansent, vont, viennent, courent sur scène, sortent, reviennent… Le big band est composé sept Bombardes, cinq Cuivres, deux Claviers, deux Guitares et une assise basse batterie. Le résultat ? Un savant et détonnant mélange qui mêle les airs de funk et de salsa version cuivre et bombarde ! Pourquoi un tel nom ? Parce que la bombarde est fabriquée à partir du bois dur en provenance du Mozambique. Autant dire, qu’ils auraient tout autant pu s’appeler les Guimbardes du Laos, les Tubas du Guatemala, les Triangles du Bermude ou les Flageolets du Beaujolais. La véritable Afrique sera présente au festival avec pour la première fois l’ouverture de la scène à un groupe en provenance directe de Dakkar : Xalam Stars. Déjà attendus en 2007, les musiciens avaient du annuler leur déplacement, s’étant vu refuser, au dernier moment, leurs visas. Composé de six artistes handicapés et de quatre valides, le groupe se rattache à la musique Afro-Assico, inspirée de la pure tradition mandingue. Ce style mélange des instruments classiques tels les djembés, le balafon, le tama ou les tambours avec d’autres plus modernes comme le clavier et la guitare acoustique. Depuis sa création en 1996, Xalam Stars n’a cessé de promouvoir et de rendre visible le potentiel artistique issu du milieu du handicap et d’utiliser la musique pour sensibiliser le public aux questions s’y référant, avec notamment les problématiques d’accès à la culture, aux instruments et aux connaissances. De l’Afrique à la Bretagne, la route est longue, surtout si l’on fait un détour par la Chine, le Pérou et le Québec. C’est ce périple que nous propose « Pinky Blouse », un groupe de voyageurs constitué de six adultes porteurs d’un handicap mental, accompagnés de deux encadrants. Tous travaillent au foyer « Le Pont de Pierre » situé à Brétigny sur Orge. Le groupe est issu d’un atelier musical de treize adultes qui se réunit toutes les semaines. L’animation musicale est essentiellement basée sur le rythme et utilise des instruments de percussions variés. Au-delà du plaisir qu’elle procure, la musique est un support à l’intégration sociale, c’est un moyen d’expression, de créativité qui permet à ces adultes de participer activement à la vie culturelle qui les entoure. C’est l’occasion de changer notre regard : la curiosité ne porte plus sur le handicap mais sur la « prestation », sur le travail réalisé, sur la concentration et l’effort fourni pour cette occasion. Et même si ce n’est pas parfait, les idées de partage et de sincérité restent bien présentes. Le spectacle que présentera « Pinky Blouse » sera accompagné à la flûte et soutenu rythmiquement par les musiciens de l’association « culture sans frontière ». Bon spectacle à toutes celles et tous ceux qui se rendront à Carentoir les 4, 5 & 6 juillet.

Contacts : Jean-Yves Hercouët  ou Maryse Gicquelet ESAT La Ferme du Monde : 9, rue Abbé de la Vallière 56910 Carentoir Tél : 02.99.93.70.70  ou 76 / Portable : 06-30-05-56-22

Jacques Trémintin - LIEN SOCIAL ■ n°890 ■ 26/06/2008