Des toiles pour un festival - Pontchateau (44)

L’art pénètre de plus en plus le secteur du handicap, non seulement comme outil pédagogique, mais aussi comme support d’épanouissement.

Le festival Handistar, qui se produit chaque année depuis 2001, a décidé de s’ouvrir aux arts graphiques. L’édition 2009 qui se tiendra les 4 et 5 juillet, leur offrira un espace d’exposition qui viendra se rajouter aux 60 groupes et 400 artistes qui s’y produiront. Lien Social est allé à la rencontre d’un établissement qui présentera ses œuvres, à cette occasion.

Fonctionnement d’une SACAT

Une zone industrielle dans une petite ville de Loire Atlantique. Au fond d’une impasse, un grand bâtiment de construction récente. Ici, les espaces sont aérés et spacieux, éclairés par de grandes baies vitrées : bienvenue au CAT du Brivet (1). Des tableaux bariolés égaient le hall d’accueil, ainsi que les salles de réunions et les bureaux des cadres. Ils ont été réalisés par des adultes de la « section adaptée » du CAT : la SACAT. Le service accueille une trentaine d’adultes porteurs de déficiences intellectuelles ou psychiques moyennes et profondes. La plupart vit en foyer d’hébergement, en famille ou en logement autonome. Tous sont en situation périphérique par rapport aux ateliers du CAT. Les uns arrivent tout juste d’IME, la SACAT constituant un sas avant qu’ils ne soient affectés progressivement sur un poste à temps plein. D’autres sont à mi-temps ou à temps partiel en atelier de production. D’autres encore, parmi les plus âgés, nécessitent une adaptation à leur fatigabilité. Djamila Bendra et Charlotte Rouquier qui nous présentent leur service, ont, depuis leur arrivée, laissé libre court à leur créativité, dynamisant le groupe d’adultes et multipliant les nouveaux projets. Elles ont pour cela reçu le soutien de leur direction locale et celle du siège qui ont appuyé et validé leur action.

 

Un programme étoffé

Il n’est pas question ici d’offrir un panel d’activités, comme le ferait un centre culturel. Chaque adulte bénéficie d’un projet individualisé qui établit ses compétences et ses difficultés et qui fixe des objectifs devant lui permettre de progresser. Les outils mis en oeuvre doivent répondre au mieux aux besoins ainsi identifiés. Untel rencontre des difficultés de socialisation ? On va privilégier la réalisation d’une table en mosaïque nécessitant la collaboration de plusieurs personnes en même temps, le travail de chacune étant nécessaire pour la réalisation du produit final. Telle autre a une image particulièrement dégradée d’elle-même ? Un atelier d’esthétique lui est proposé : apprendre à se regarder, à s’accepter, à se coiffer, à se maquiller. Telle autre encore a une approche très boulimique : on va délibérément fractionner l’activité qu’elle va pratiquer, afin qu’elle apprenne à temporiser et à attendre avant de la poursuivre. Chaque animation fait l’objet d’une programmation sur un an, deux ans ou plus, un bilan étant fait en concertation avec les adultes qui les fréquentent, pour décider soit de les prolonger, soit d’y mettre un terme. C’est ainsi que l’activité plus traditionnelle « cuisine » ou « couture » se mêle avec du théâtre, du cirque, de la fabrication de meubles en carton, de l’élaboration de bijoux … sans oublier l’atelier de peinture.

 

Se réaliser dans la peinture

Au départ, il y a cette passion de Djamila Bendra pour l’art moderne. Mais l’enjeu a surtout été de trouver des techniques adaptées au potentiel des adultes accueillis. Le figuratif, avec son maniement précis des pinceaux et son appréhension des quantités de couleurs à appliquer, risquait des les mettre en échec. Il a été écarté au profit de l’art abstrait. Le groupe s’est d’abord rendu dans des musées ou des expositions consacrés à cette école. Des livres ont aussi été empruntés sur ce thème et des photocopies couleurs des œuvres placardées sur tous les murs. De quoi s’imprégner d’un style, d’une approche. Puis, les pinceaux ont été troqués contre des spatules. Et les adultes ont commencé à peindre les toiles de couleurs superposées, un judicieux grattage permettant ensuite de faire réapparaître à la surface les couches successives. Certains s’en sont particulièrement bien sortis, montrant une vraie créativité. Pour d’autres cela a été moins évident. « Mais même si nous avons une certaine exigence quant au résultat, ce que l’on recherche, c’est avant tout le bien-être au moment de la réalisation, la satisfaction éprouvée » explique Djamila. Une vingtaine de toiles ont ainsi été réalisées. Le SACAT s’était déjà déplacé au festival Handistar, en 2005 comme simple spectateur, puis en 2006 pour présenter une pièce théâtrale. Cette fois-ci, c’est un groupe de six adultes accompagné de deux encadrantes qui ira fièrement exposer ses œuvres, les 4 et 5 juillet. Y sera aussi mise en vente la production de bijoux en pâte Fimo. Le week-end a déjà pu être autofinancé par le marché de noël proposé par le SACAT. Mais, nos deux professionnelles pensent déjà à l’avenir. Leur souci ? Eviter la routine et donc diversifier et renouveler les techniques proposées. Djamila Bendra a des idées pour son atelier : pourquoi pas de la peinture avec certaines parties du corps … « Pas mal, pour des AMP, non ? » s’exclame fièrement Charlotte Rouquier, qui tient à préciser leur statut professionnel réciproque. Chapeau, mesdames !

Contact : Festival Handistar, Carentoir, Tel : 02.99.93.70.70  ou 76 / Portable : 06-30-05-56-

Cat du Brivet, établissement dépendant de l’APEI Ouest 44, Pontchâteau tel : 02 40 45 66 55, Courriel : cat@brivet.apei44.asso.fr


Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°934 ■ 02/06/2009

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