À quand l’armistice ?

En imposant, depuis les années 1960, sa tyrannie arrogante et despotique, la psychanalyse a commis beaucoup de dégâts, notamment en désignant les mères comme responsables de l’autisme de leur enfant. En proposant d’intenses stimulations destinées à réduire les comportements à problème de leur enfant, les méthodes comportementalistes entretiennent auprès des familles l’illusion d’une normalisation improbable. Entre ces deux écoles, la guerre de tranchée dure depuis des années, chacune accusant l’autre qui d’entretenir les difficultés des patients, qui de les dresser et les robotiser pour en faire des animaux savants. De chaque côté, on trouve des intégristes : « tout est dans les gènes » ou « tout est dans l’inconscient ». Mais aussi, de plus en plus, des praticiens faisant preuve d’une humilité face à l’énigme de ce syndrome, d’une ouverture d’esprit à l’égard des différentes approches et de la conscience que personne n’y arrivera seul. J’en veux pour preuve la position de Bernard Golse, éminent pilier de la psychanalyse qui n’hésite pas à affirmer : « aucun psychanalyste sérieux ne s’oppose aujourd’hui aux méthodes éducatives qui peuvent beaucoup aider l’enfant autiste à accroître ses habiletés sociales »(1). Et de préciser sa pensée, en évoquant que le trépied fondamental de la prise en charge de la personne avec autisme comprend aux côtés de la rééducation orthophonique/psychomotrice et de la psychothérapie analytique : « une aide éducative (type ABA, PECS, 3 I ou TEACCH par exemple) ». Gageons que les gardiens du temple préparent déjà les fagots du bûcher et que les pourfendeurs du diable psychanalytique traiteront cette main tendue, avec le plus grand mépris. Laissons-les se gargariser de leurs certitudes. Privilégions le dialogue avec les femmes et les hommes de bonne volonté qui, tout en défendant leurs convictions, refusent de les enfermer dans le dogme, l’idéologie et la vérité révélée et voit chez l’Autre une complémentarité possible.


(1) « Vivre avec l’autisme, une expérience relationnelle » Juan Larban Vera, préface Bernard Golse (érès, 2016) p.16

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1236 ■ 04/10/2018