Droit à l’amour?

Gabrielle Russier, professeur de 32 ans tisse une liaison amoureuse avec Christian Rossi, son élève âgé de seize ans. Nous sommes en 1968. Leur relation perdurant, la famille de l’adolescent saisit la justice. La jeune femme est incarcérée en préventive et condamnée à un an d’emprisonnement avec sursis. L’histoire d’amour se terminera mal, Gabriel Russier se suicidant et Christian Rossi se retrouvant interné temporairement en psychiatrie. Un film et une chanson (1) perpétueront le souvenir de ce fait divers. Près de cinquante plus tard, une assistante familiale âgée de 45 ans de la région d’Abbeville s’éprend de l’adolescent de 14 ans qui lui a été confié par l’Aide sociale à l’enfance. Le changement de famille d’accueil ne mettra par un terme à leurs relations. L’assistante familiale a été condamnée à trois ans de prison dont 18 mois avec sursis. S’éveillant à la sexualité adulte, un(e) adolescent(e) peut, parfois, ressentir une attirance amoureuse pour le bel entraîneur sportif ou la plantureuse professeure de français. Rien, que de très normal, à un âge où l’on cherche à tester ses capacités de séduction. Le contraire est-il possible ? Pourquoi pas. Mais l’amour que voue un enseignant, une assistante familiale ou un éducateur à l’enfant qui lui est confié est d’un autre registre. Il se détourne de la sexualité génitale pour s’aligner sur la figure parentale. L’attachement réciproque qui se tisse n’a pas pour destinée une vie de couple, mais la croissance, la maturation de l’enfant et son cheminement pour advenir comme adulte équilibré et épanoui. Sarah, 15 ans, confie à son référent être amoureuse du Directeur adjoint de son institut d’éducation motrice, âgé de 35 ans et tout juste divorcé. Il lui suggère d’en parler à l’intéressé. Ce dernier lui répondra être touché par le sentiment dont il est l’objet, mais ne pas être disponible du fait de la différence d’âge. Il l’encouragera à chercher un amoureux de son âge. Ce qu’elle ne tardera pas à faire.


(1) « Mourir d’aimer » Chanson de Charles Aznavour et film d’André Cayatte (1971)

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1206 ■ 27/04/2017