Le coût de la virilité. Ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme des femmes

PEYTAVIN Lucile, Éd. Le livre de poche 2023, 192 p.

Pour être bien identifiés, les stéréotypes de genre n’en sont pas moins encore très répandus. Pour être discriminatoires, ont-ils pour autant un coût ? C’est la question, jamais étudiée jusque-là, qu’explore l’auteure.

Dans les représentations courantes, l’homme se doit d’être fort, courageux, stable, actif dominateur, avisé, volontaire, porté à l’expansion et capable de raisonner. Du moins s’il veut être en conformité avec les attributions banalisée et courante du sexe masculin.

Quant à la femme, elle est bien entendu naturellement programmée pour la maternité et présente des qualités qui lui sont propres : douce et aimante, passive et inconstante, soumise et incrédule, gouvernée par les émotions, irrationnelle et bien sûr inapte au raisonnement abstrait.

Tout semble confirmer cette répartition. Après tout, si les ouvriers du bâtiment et les joueurs de rugby sont à 98% et 97% des hommes, si et les aides à domicile et les danseuses sont à 97,7% et 93 % des femmes, n’est-ce pas parce qu’il y aurait adéquation entre les compétences sexuées d’un côté et ces fonctions professionnelles ou ces sports de l’autre ?

Toutes les argumentations venant valider cette essentialisation genrée ont été déconstruites. La testostérone à l’origine de l’agressivité dix fois plus présente chez le garçon que chez la fille ? C’est en devenant violent que le taux de testostérone s’accroit, pas l’inverse. Un cerveau différent selon le genre ? A la naissance, il est le même, 10% seulement des connexions cérébrales étant réalisées. Et ce sont bien l’apprentissage et l’environnement qui contribueront à produire les connexions des 90% restantes.

En réalité, la démonstration en a été faite à de multiples reprises, les rôles féminins et masculins sont le fruit d’une longue construction culturelle, consolidée par le politique, la métaphysique, la religion et la science. Ils sont reproduits par l’éducation, par l’école et la société. Construction qui se reproduit de génération en génération.

La socialisation qui intervient dès la naissance est différentiée selon l’attribution qui est faite de l’appartenance à un sexe ou à l’autre.

L’acculturation des filles les pousse à adopter des comportements altruistes, à la gestion de leurs motions et à la maitrise de leur corps.

L’acculturation du garçon à la violence se fait très tôt. L’incitation à des jeux vigoureux, à la domination et la prise de pouvoir sur les êtres et les choses s’accompagnent du renoncement à sa sensibilité, à ses émotions et à son empathie. Le culte de la force entraine le dénigrement des faibles (qu’ils soient d’ailleurs hommes ou femmes). C’est à ces conditions qu’il sera possible de se montrer à la hauteur des attentes induites par la virilité.

Le problème tient non seulement ans les fortes discriminations qu’induisent tous ces préjugés, mais aussi à leur coût pour la société.

Que représentent les 83% d’infractions pénales, les 90% de condamnations judiciaires, les 86 % de mise en cause pour meurtre et les 95% pour les vols avec violence, les 99% de viols, des 86% des accidents de la route mortels … qui sont portés par seulement les hommes ?

 Lucile Peyrtavin consacre les cinquante dernières pages de son livre à des savants calculs structurés autour de formules mathématiques tout aussi érudites. Cela permettra aux amateurs de vérifier son raisonnement. Tenons-nous en, ici, aux résultats. Pour notre société, cela nous coûte la modique somme de 95,2 milliards d’euros par an !

Ne serait-il pas temps de changer les modalités d’éducation de nos garçons, en les ouvrant à une autre perspective que cette virilité qui bat et qui tue, qui viole et qui domine, qui écrase et pervertit… et qui nous ruine ?