Oui, la terre fondatrice du
travail social est bien de gauche : elle le pousse naturellement vers les
exclus, les relégués, les oubliés de la prospérité. Elle s’abreuve aux valeurs
humanistes à la confluence du paternalisme caritatif, des mouvements issus de
la résistance et des œuvres confessionnelles. Mais non, il ne faut pas
l’enfermer dans cette dimension mythique fondatrice. Certes, la logique
néo-libérale, paradigme de la droite, se donne pour finalité l’économie marchande
qui n’est autre que la rémunération du capital et ambitionne de diminuer les
dépenses imputables aux finances publiques, y compris celles qui permettent de
faire fonctionner les dispositifs sociaux. L’action visant l’intégration des
publics les plus en difficulté ne peut que rentrer en contradiction avec cette
vision de la société directement responsable de leur exclusion. Le travail
social doit continuer à interpeller les pouvoirs publics et offrir aux
populations un espace de réflexion dans lesquelles elles peuvent agir, mais non
tomber dans le romantisme de vouloir faire la révolution à partir de sa mission
subventionnée. Il n’a pas pour mission de conduire au changement, mais de
favoriser le désir de changement. Cette nuance n’est pas que sibylline. Elle distingue
le domaine du politique, de celui de la politique. D’autant que les repères se
sont notablement brouillés. La politique sociale a connu une étonnante
continuité sous tous les gouvernements, depuis cinquante ans. Et il est parfois
difficile de distinguer celle menée par un conseil général de droite de celle
d’un conseil général de gauche. D’un côté comme de l’autre, on semble séduit
par la démarche technocratique qui vise à rationaliser à coup de normes
standards et opposables qui privilégient la forme sur le fond et les résultats
immédiats sur le travail en profondeur. La loi sur la LOLF n’a-t-elle pas été
votée à l’unanimité sous le gouvernement Jospin ?
Loin du trop fréquent
discours de stigmatisation, le dossier que consacre le numéro de ce début
d’année du bimestriel « Non-violence actualité » à la question de la
jeunesse, l’aborde d’emblée sous un angle iconoclaste. C’est Gérard Guillot qui
situe la problématique en terme de démission des figures d’adultes. Qu’ils
soient complices (type parent copain), cautions (projetant un rêve
d’adolescence inassouvi), indifférents (j’ai fait ce que j’ai pu, maintenant
démerdes-toi) ou dogmatiques (allergiques à la culture jeune), il n’y a plus
guère de ces « adultes-adultes » qui acceptent de jouer le rôle
ingrat de celui contre qui l’adolescent va se construire, qui adoptent la
solution du dialogue conflictuel, qui savent à la fois être à l’écoute et
dialoguer et à la fois poser un cadre quand cela est nécessaire. Notre société,
qui tend à remplacer les adultes par les adolescents en tant que modèle
d’identification, se montre trop souvent incapable non de réconcilier, mais de
concilier les postures de consommation dans une culture d’immédiateté et les
attitudes qui privilégient l’inscription dans une temporalité longue.
Fidèle à sa ligne éditoriale, le journal ne se contente pas de dresser un état
des lieux, il se veut la tribune des actions innovantes. Ainsi, de ces ateliers
de paroles proposés dans les collèges conçus comme autant d’espaces d’échanges
et de discussion. Ou encore ce programme « Cet Autre que moi »
utilisé plusieurs centaines de fois depuis sa création en 1997 et qui se
destine à l’éducation à la responsabilité affective et sexuelle entre filles et
garçons. Mais aussi ces élèves médiateurs, formés à travers toute la France,
qui se sont retrouvés pour la première fois au niveau national à Caen en juin
2007. Autant de supports et d’outils proposant aux adolescents à la fois une
écoute et un positionnement citoyen.
Plus encore que l’école, les
vacances sont l’occasion de permettre aux enfants de se confronter dans une
dynamique de découverte et d’apprentissage de l’autre. Comment leur faire vivre
ensemble dans une logique intégrant des modes de régulation de la
violence ? Que ce soit sous la forme de cours d’éducation citoyenne
proposés par MACAQ (Paris), d’une stratégie globale de prévention de la
violence choisie par « lâche la violence » (Angers) ou encore du
choix d’Altern’Educ (Lille) de partir de l’expérience des enfants eux-mêmes
plutôt que de privilégier des discours sur des termes aussi abstraits pour la
plupart d’entre eux que l’égalité ou la solidarité, tous les moyens sont bons
pour intégrer aux pratiques quotidiennes une ouverture à l’éducation
relationnelle. Restent la nécessaire formation des animateurs à cette approche
et l’engagement des fédérations d’éducation populaires organisatrices des
Bafa/bafd dans cette voie.
Tony Anatrella, prêtre et psychanalyste, s’est rendu
tristement célèbre pour avoir pris la tête de la croisade contre
l’homosexualité. Dans son dernier ouvrage*, il considère cette orientation
sexuelle comme à la fois un échec dans le processus normal du développement
psychique de l’individu, la conséquence d’un manque d’intériorisation de la
différence des sexes et le résultat d’une identification au même que soi. Il
s’agirait d’une fixation au stade narcissique donnant des personnalités très
imbues d’elles-mêmes qui ne peut que susciter un trouble légitime. Toujours
selon ce brave homme, assimiler la réaction face à ce qu’il estime être une
déviance à une forme de racisme serait une « imposture », car cela relèverait
en fait « d’une angoisse existentielle et non pas d’une quelconque
"homophobie", comme on veut le prétendre dans un excès
d’interprétation psychologique moralisante ». La revue chrétienne Golias et
la radio Europe 1 viennent de révéler que l’éminent prélat, docteur es moralité
aurait fait l’objet de deux dépôts de plainte (au printemps et en octobre 2006)
pour agression sexuelle. Deux séminaristes en questionnement sur leur sexualité
adressés en "thérapie" par leur hiérarchie au prêtre-analyste se
seraient retrouvés au fil des séances dans des situations de rapports sexuels.
Mgr Lustiger, archevêque de Paris à l'époque des faits, mis au courant aurait
réprouvé, sans pour autant rendre l'affaire publique, ni saisir la justice. La
sexualité de ce Monsieur le regarde prévient Golias. Mais « cette
protection s’arrête pourtant là où une conduite professionnelle en vient à
s’égarer hors des frontières du légalement acceptable, lorsqu’il y a atteinte à
l’intégrité morale et physique d’autres personnes : ce qui est un comble
d’hypocrisie de la part d’un moralisateur de cette autorité » conclue
la revue.
Le “ Monde de l’Education ” de ce mois de Mai 1998 ne pouvait
que demander à Daniel Cohn-Bendit d’être son rédacteur-en-chef invité. Le thème
choisi du dossier central est consacré à l’autorité. Mai 68 se situe à la
charnière entre deux mondes antinomiques : celui qu’on peut désigner comme
autoritariste qui impose et asservit et celui authentiquement démocratique qui
éduque ses membres à l’autonomie et à la responsabilité. Le premier a été largement
rejeté et critiqué depuis 30 ans. Mais le second peine à advenir. D’où un vide
nommé par les uns tolérance et nouveau dialogue entre générations et par les
autres déclins des mœurs et démission parentale. Divers articles décrivent les
tentatives déployées au sein de l’Education Nationale pour tenter de créer une
authentique démocratie scolaire : lycée autogéré de Paris, Université de
Vincennes, les 300 classes du secondaire expérimentant les propositions du
groupe Desgenettes-Agasp, …
(“ Le Monde de
l’éducation, de la culture et de la formation ” n°259 Mai 1998)
Le numéro du mois de juin d’
« Enfant d’Abord » consacre son dossier central à la question du langage.
A partir de 18 mois y explique-t-on l’enfant acquière en moyenne 1 mot par
heure. A 3 ans, il parle presque couramment. Toutefois langage d’élite et
parler ordinaire se distinguent dès cet âge en fonction des inégalités sociales
et culturelles qui interfèrent sur l’apprentissage: une classe de maternelle
est beaucoup plus hétérogène qu’une classe de sixième ! Ce qui apparaît comme
déterminant c’est plus la quantité que la qualité: rien ne remplace
l’interaction entre l’adulte et l’enfant. Les orthophonistes s’accordent
néanmoins sur l’importance et l’efficacité d’une intervention précoce. Mais le
langage est aussi celui des personnes sourdes. L’université Gallaudet aux USA
est considérée comme La Mecque de la langue des signes. La confrontation des
enfants non-entendants à cette technique et cela dès le plus jeune âge permet
de développer normalement leur intelligence et leur capacité à la lecture, à
l’écriture et à la compréhension. Cette option longtemps rejetée par les
oralistes (qui sont les partisans de l’enseignement prioritaire sinon exclusif
de la parole) fait pourtant l’objet de programmes d’évaluation concluants. Qui
finalement est le plus sourd ? Celui que son handicap définit comme tel ou
l’entendant qui du sourd ne veut rien entendre ?
Pierre de Givenchy est
éducateur. Il y a plus de 20 ans, une adolescente l’invite à une boum à
l’occasion de son anniversaire. Ce n’est plus de son âge. Il décide
néanmoins de lui faire un cadeau et lui adresse une lettre. Il reçoit une
réponse de 4 pages ... La jeune-fille timide et réservée a trouvé un moyen
formidable de livrer toute sa richesse intérieure: la correspondance. Quand, en
1975 paraît le livre « le bourdon et le cafard » qui rassemble des
textes et poèmes d’adolescent(e)s, une invitation est lancée en fin d’ouvrage:
« tu peux écrire si tu veux ». Trois mois plus tard, c’est deux
lettres qui arrivent chaque jour chez l’éditeur. Il faut y répondre: le cercle
des adultes volontaires s’agrandit: l’association « Vivre et l’écrire »
est née. Aujourd’hui, c’est 30 à 50 lettres qui parviennent quotidiennement et
15 nouvelles demandes de correspondance par semaine réparties sur environ 150
adultes. La grande majorité des ados qui écrivent ont entre 14 et 17 ans. Leur
désir, trouver un interlocuteur à qui pouvoir tout dire: leurs angoisses et
leurs rêves, leurs joies et leurs peines, leurs contrariétés et leurs désirs.
Ils expriment tout haut ce que nous adultes, avons toujours dans la tête mais
n’osons plus dire. Il ne s’agit pas pour les correspondants de se substituer ni
aux profs, ni à des psychologues, ni encore moins aux parents, mais bien
d’offrir une écoute respectueuse et attentive. « Merci pour toutes ces
choses que tu écris, merci de vivre et de m’écouter. Merci pour le bien que tu
me fais. Oh ! Merci. Si j’avais à te décrire, je dirais que tu es une grande
bulle d’air pur » commentera un jeune. « Vivre et l’écrire » 12
rue de Recouvrance 45000 Orléans Tel: (1) 38-54-13-58 ou (1) 38-53-74-38
« Diminuer les charges
patronales », « redonner corps à l’initiative privée »... La
campagne électorale bat son plein. Les défenseurs de l’économie libérale s’en
donnent à cœur joie, trouvant que l’Etat dépense trop d’argent et devrait
utiliser ses efforts à soulager les pauvres entreprises écrasées de charges. Il
y a de cela près de 10 ans, le gouvernement s’engage à créer une « zone
franche » à Signes près de Toulon afin de fournir des emplois aux 3.800
salariés restés sur le carreau après la fermeture des Chantiers Navals de la
Normed. Coca Cola ne s’est pas fait prier longtemps et est venu installer une
usine qui emploie 188 salariés. En 1995, le chiffre d’affaire aura été de 5,4
milliards de Francs, soit 1,8 milliards de bénéfice. En temps ordinaire, le
fisc aurait empoché 660 millions. Là: rien du tout. Cela revient à
subventionner chacun des 188 emplois à raison de 3,5 millions par an, soit
292.500 F par mois ! Et dire que d’aucuns se sont élevés contre la loi Robien
qui permet un maintien ou une création d’emploi grâce à une réduction du temps
de travail pour un coût phénoménal de 5.000 F par emploi ! Devinette: quel
était le gouvernement de l’époque, droite ou gauche? Vous croyez vraiment que
la réponse est importante ?
Wan, 5 ans, travaille 13
heures par jour, 7 jours sur 7 au tissage de tapis dans un hangar froid et
obscur de Katmandou. Au Bangladesh, des enfants de 9 ans dorment au pied des
machines à coudre avec lesquelles ils cousent des chemises 15 heures
quotidiennement. Entre 80 et 200 millions d’enfants travaillent ainsi dans le
monde. La main-d’oeuvre de certains pays asiatiques est constituée à près de
20% par des moins de 14 ans. « N’achetez pas le sang des enfants »
tel aura été le cri d’Iqbal Massih, petit esclave du tapis du Pakistan avant
qu’il ne finisse assassiné en Avril 1995. « Artisan du Monde » a
décidé de répondre à cet appel en lançant une campagne « libère tes fringues »
soutenu par 22 syndicats et associations. Elle a ainsi interpellé 3
distributeurs de vêtements en France: C&A, Kookaï et La Redoute en leur
demandant quelle garantie ils pouvaient fournir aux consommateurs que leurs
fournisseurs du tiers-monde fabriquent leurs produits dans des conditions
conformes à l’éthique. Réponse des trois firmes: leurs inspecteurs
sillonnent le continent, près à rompre les contrats (dans lesquels sont
d’ailleurs prévus des closes sociales) en cas de non-respect des conditions de
travail. 20 ruptures ont eu ainsi lieu en 1995. Les quelques dizaines de
contrôleurs pour des milliers de fournisseurs représentent un risque minime
pour les fabriquants ... d’autant plus qu’en cas de sous-traitance, il est
difficile de vérifier. Saluons néanmoins l’action d’Artisan du monde pour faire
respecter les droits élémentaires de l’enfance. Soyons vigilant et attention de
ne pas être complices.
(« 60 millions de
consommateurs » n°291 -Janvier 1996)
La prestation-autonomie
annoncée à grand renfort par le gouvernement comme une avancée sociale majeure
s’avère peut-être en fait une bourde supplémentaire du fait-même de sa
préparation dans la précipitation. Jusqu’à présent, l’Allocation Compensatrice
pour Tierce Personne issue de la Loi de 1975 sur les personnes handicapées
était complétée par tout un dispositif d’aides financières et matérielles: aide
ménagère subventionnée par l’Aide Sociale et les Caisses de Retraite, réduction
d’impôt, exonération des charges patronales pour les employeurs de plus de 70
ans, aides ponctuelles de la CNAV pour les gardes à domicile. Jusqu’alors, une
personne âgée ayant droit à 90 heures d’aide ménagère, versait une quote-part
en fonction de ses revenus (de 6,50F à 79,50F de l’heure). A partir du 1er
janvier 1996, grâce à la Prestation-Autonomie d’un maximum de 4300F, cette même
personne devra tout financer au prix fort de 82F de l’heure, soit 7380F par
mois.
Le Centre Mutualiste de
Kerpape à Lorient s’est lancé depuis cinq ans dans une expérience tout à fait
extraordinaire: le dressage de singes comme auxiliaire de personnes
handicapées. C’est en 1977, à Boston aux USA qu’un tel programme est né. Les
réussites outre-atlantique ont été importées en 1989 et connaissent à leur tour
le succès. Les animaux sélectionnés sont des singes capucins. Leur comportement
social stable se combine à merveille avec un bon niveau d’intelligence. De
taille et de poids réduits (1,5 kg pour 50cm à l’âge adulte), leur espérance de
vie est en outre de 30 ans. Une vingtaine de mots-clé suffisent pour leur
indiquer des opérations-simples: ouvrir le frigo, prendre un plat, le placer
dans le four micro-onde, régler le temps de cuisson, le servir, placer et
retirer une cassette audio ou vidéo, tourner les pages d’un livre, etc ... La
phase de socialisation prend environ trois ans: elle est confiée à un éleveur
de chien. La phase de conditionnement, elle, dure entre six et douze mois:
c’est un éducateur qui s’en charge. L’installation chez la personne handicapée
nécessitera trois semaines d’adaptation, l’éducateur restant sur place pour
habituer l’animal à son nouveau maître et à son nouveau cadre de vie. A la fin
de l’année 1995, cinq singes auront été placés auprès de personnes
tétraplégiques: Pruneau, Jacki, Tendresse, Bara et Amann. Trois autres animaux:
Cozig, Corsen et Créach sont actuellement en phase d’éducation.
La rentrée scolaire est
passée depuis plus d’un mois. De quoi faire le point sur ces expériences
d’intégration de jeunes handicapés au circuit ordinaire de l’Education
Nationale. Ainsi, à Nantes, l’inscription de deux enfants âgés de 7 ans,
atteints de trisomie, à la maternelle de la Perverie. « On ne contrôle
pas ce qu’apporte le groupe et ce qui est profitable à ces enfants,
explique le Directeur, mais il est clair que l’expérience est concluante ».
Pour l’instituteur, cet accueil n’est pas banal et demande un grand
investissement : il doit s’adapter aux réactions spécifiques exprimées par
chaque enfant. Les autres bambins manifestent quant à eux des comportements de
surprotection face à leurs aînés dont ils perçoivent très vite la plus grande
fragilité. Pour que cette initiative fonctionne, il faut le soutien de
spécialistes. C’est ce qu’apporte l’APAJH (l’Association pour les Adultes et
les Jeunes Handicapés) qui a signé avec l’école maternelle une convention
d’intégration précisant le rôle de chacun et assurant notamment les temps de
concertation et d’intervention dans et hors de la classe des éducatrice
spécialisée, orthophoniste et psychométricienne. Il arrive un moment,
toutefois, où l’école classique ne permet plus les progrès des jeunes
handicapés qui n’arrivent plus à suivre. Le relais est alors assuré par des
écoles spécialisées. Ce qui ne remet nullement en cause cette première phase
d’intégration grandement bénéfique à l’éveil des enfants atteints de trisomie.
Face au culte du sport à tout
prix, les milieux médicaux mettent en garde contre la nocivité d’une pratique
intensive chez les enfants en pleine croissance. Au départ, il y a ces parents
qui fixent à leur progéniture des objectifs sportifs qu’ils n’ont jamais pu
atteindre eux-mêmes, ou encore ces modèles de réussite qu’il serait idéal d’imiter.
Le forcing n’est pas un danger véritablement perçu. Pourtant, chaque année,
600.000 accidents lui sont imputables : arrachement de cartilage chez les 8-15
ans prématurément musclés, tendinites et autres accidents musculaires, maux de
dos préparant scoliose et arthrose précoces à l’âge adulte,... Quelques règles
élémentaires permettent de préserver la santé des enfants pratiquants. D’abord
respecter les trois temps égaux devant structurer leur vie: travail, loisir,
repos; puis, leur laisser vivre leur période de croissance en évitant toute
compétition intensive avant les 15-16 ans; encore, prendre les conseils d’un
spécialiste de chaque discipline envisagée; enfin, ne jamais négliger le suivi
médical. Surtout: garder au sport son aspect ludique et de plaisir.
La Fédération des Comités
Alexis Danan a consacré le dernier numéro de sa revue à un dossier sur
« l’enfant et la guerre ». Introduit par un long article de Stanislas
Tomkiewicz qui alterne son propre témoignage d’enfant du gettho et des camps de
concentration nazis et d’adulte pédiatre/ neuro-psychiatre, la
publication s’intéresse plus particulièrement au Prix Strauss attribué en 1995
par l’AFIREM (Association française, d’Information er de Recherche sur
l’Enfance Maltraitée) à une O.N.G. qui apporte une assistance médicale dans les
pays en guerre: MERLIN. La guerre moderne a inversé la proportion des
acteurs impliqués: si en début de siècle, on comptait 1 mort civil pour 9 morts
militaires, les conflits de ces dernières années ont vu mourir 9 civils pour 1
militaire. Les enfants apparaissent au premier plan des victimes: en 10 ans,
dans cette catégorie d’âge, 2 millions de morts, 4 à 5 millions d’infirmes, 10
millions de survivants traumatisés ! A l’image de ces enfants mozambicains
recrutés par des forces armés qui les contraignaient, pour s’aguerrir, à tuer
leurs propres parents, la moindre émotivité manifestée à cette occasion
entraînant leur propre mise-à-mort ! Les facultés d’adaptation des enfants
placés dans de telles conditions traumatisantes sont étonnantes, la reprise de
la vie au sein d’une société pacifiée s’avérant tout à fait possible. Encore,
faut-il s’adresser à lui dans sa dimension globale: non seulement soigner son
corps, mais réhabiliter la parole et l’affectif.
La revue des psychologues
propose un dossier consacré à « Nos enfants et la violence ».
Véritable bouffée d’oxygène dans un traitement médiatique parfois bien
racoleur, l’éditorial rappelle qu’il ne faut pas confondre prise de conscience
et inflation du problème. La violence est nichée au fond de chacun d’entre
nous. Il convient de ne pas la confondre avec l’agressivité qui apparaît dès
que le nourrisson se sent en compétition avec l’autre. Pendant des siècles, la
société a aménagé des fêtes et des rituels permettant d’exorciser cette
agressivité: carnavals, fêtes des fous, charivari codifiaient ainsi
l’évacuation des tensions. Ces espaces ont pour l’essentiel disparu
aujourd’hui, remplacés par une télévision omniprésente. Certes la violence qui
y est exhibée, fascine l’enfant et provoque chez lui un flux continu d’émotions
d’autant moins contrôlé qu’il le reçoit dans une position de grande passivité.
Mais, la télé ne créée pas ex-nihilo des comportements, elle ne fait que
favoriser ceux déjà existants. La solution ne consiste pas à interdire (ce qui
serait une violence opposée à une autre violence), mais bien plutôt d’éduquer l’enfant
pour en faire un spectateur averti. Il est important alors de parler avec lui
sur ce qu’il a vu de façon à l’aider à faire la différence avec la réalité. Le
problème est donc simplement déplacé: l’atmosphère familiale joue un rôle bien
plus essentiel. Et si la violence débridée qui peut y régner agit lourdement
sur l’agressivité de l’enfant, la violence qui ne s’exprime pas et la
confrontation qui est étouffée sont tout aussi pathogènes. Car la vie et la
pensée sont par nature conflictuelles: il faut faire la place à ce conflit
justement pour canaliser l’agressivité. Enfin, la véritable réponse du monde
adulte c’est peut-être surtout de réapprendre aux enfants le désir, le rêve et
l’envie de vivre.