Une séparation de couple, comme il en existe des milliers. Celle-ci est particulière, le père ayant changé de sexe. Où fixer la résidence de l’enfant ? Le juge des affaires familiales explique le choix de la mère : en cherchant à accueillir son enfant, le géniteur « chercherait à asseoir sa féminité », alors que sa fille « va entrer dans la période oedipienne, un évènement majeur pour la personnalité de l’enfant, qui lui permet de  se construire en s’identifiant aux modèles masculins et féminins qui l’entourent ». On se doute bien que le magistrat n’a pas inventé cette appréciation. Il a fait appel à une expertise psychologique, dont l’inspiration psychanalytique saute aux yeux. Alors que ce type d’évaluation devrait se montrer prudent, dénué de tout jugement moral et ouvert sur l’ensemble des possibles, on constate que dans cette affaire, les conclusions sont péremptoires, suintant la vérité révélée et se montrant intransigeantes. Cette décision apparaît particulièrement discriminatoire, car désignant un parent inapte à éduquer son enfant, en raison de sa transidentité. Le choix de changer de sexe ne prédispose nullement à la compétence parentale, pas plus qu’il ne l’invalide. Tout se mesure concrètement. Ici, on ne semble pas se prononcer à l’aune d’un parent singulier et d’un enfant particulier, mais à partir de l’application d’un principe prétendument universel qui s’appliquerait invariablement, quelle que soit la situation concrète. Il ne manquera pas de psychanalystes pour hurler, avec raison, contre le dévoiement scandaleux de leur discipline. Preuve est faite, une fois de plus, que toute théorie quelle qu’elle soit, dès lors où elle se prétend totalisante donc totalitaire, peut être instrumentalisée pour alimenter ce qu’il y a de plus réactionnaire et rétrograde. Contrainte dans un premier temps à rencontrer son enfant dans un lieu d’accueil parent/enfant, cette femme a finalement obtenu en appel un droit de visite simple.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1196 ■ 24/11/2016