La réforme de la protection de l’enfance

VERDIER Pierre & EYMENIER Michel, Editions Berger-Levrault, 2009

Voilà une excellente présentation de la réforme de la protection de l’enfance. Les auteurs ont fait le choix de traiter avec une grande clarté et une précision tout aussi pertinente chacune de ses dimensions. On peut s’y référer, comme on le ferait avec un guide juridique. En annexe, on trouvera notamment les textes de lois concernés, avec l’identification des parties modifiées. Pointe, pourtant, et c’est ce qui donne de la vie et du dynamisme à cet ouvrage, les orientations idéologiques des auteurs. Ils se revendiquent comme défenseurs du droit des personnes et notamment du droit des parents et adversaires de ceux qui privilégient la protection de l’enfant au détriment parfois des familles. Ils distinguent d’un côté ceux qui voient dans les parents les seuls à même de résoudre les problèmes rencontrés. Ce sont les bons, n’en doutons pas, c’est eux qui ont raison : « de manière générale en disqualifiant les parents, nous n’aidons pas les enfants » (p.20) De l’autre, il y a les méchants, ceux qui pensent que les parents sont forcément des incapables et que la seule compétence se trouve du côté des professionnels. Face à une loi qui est le produit d’un compromis entre ces deux tendances opposées, les auteurs applaudissent les avancées qui vont dans leur sens : droit d’audition des enfants, élaboration contractuelle du projet pour l’enfant, affirmation de la subsidiarité de l’action sociale sur la solidarité familiale, accueils modulables ou de jour destinés à mieux cerner les difficultés, tout autant que les ressources des parents… Les mêmes déplorent tout ce qu’ils identifient, peu ou prou, comme une atteinte aux droits des parents : la notion d’intérêt de l’enfant qui laisse aux magistrats une plus grande marge d’incertitude et d’arbitraire, le pouvoir de décision laissé aux services en charge quotidien de l’enfant dans l’exercice de certains acte non usuels relevant de l’autorité parentale, la légalisation de ces visites protégées en présence d’un tiers qui donnent le sentiment aux parents d’être surveillés, la possibilité d’un placement illimité (contre la limite fixée à deux ans, par la loi de 1986)... Les auteurs applaudissent aussi à l’accroissement de la prévention (qui représente aujourd’hui 4% seulement des cinq milliards de budget consacrés à la protection de l’enfance), tout en s’inquiétant toutefois d’un risque d’intrusion et de contrôle social. L’ouvrage des consorts Verdier et Eymenier a l’immense avantage de présenter, même si c’est parfois quand même un peu caricatural, la scission qui structure la protection de l’enfance dans notre pays. Le lecteur n’est nullement tenu, à l’issue de cette lecture, de s’engager dans un camp plutôt que dans un autre. Il peut aussi, après avoir pris connaissance des différents arguments, choisir de faire sa propre synthèse.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°928 ■ 07/05/2009