L’enfant sacrifié

SPENLE Marielle, Éd. Librinova, 2022, 353 p.

Qu’est-ce qui rend Laura, personnage principal de ce roman, si attachante du début à la fin ? Peut-être est-ce lié à son histoire personnelle qui l’a marquée à jamais, les origines n’étant dévoilées qu’aux toutes dernières pages. On dit souvent que le choix des métiers du soin et de l’accompagnement ne se fait pas au hasard. La recherche supposée d’une réparation à travers l’accompagnement d’autrui se vérifie ici, pleinement. Peut-être aussi parce que ce récit alterne les épisodes d’une activité publique et d’une vie privée. Derrière tout travailleur social, on n’imagine pas forcément des parcours faits de moments de bonheur, mais aussi d’épreuves, comme tout un chacun. Les voilà révélés. Peut-être encore en raison de la description des premiers pas dans un service départemental de polyvalence de secteur d’une assistante sociale tout juste diplômée. Très vite, une évidence s’impose à elle : confrontée trop souvent à l’impuissance pour proposer des solutions, ce qui compte plus que tout, c’est l’écoute attentive, l’empathie bienveillante et la posture non-jugeante qu’elle propose. Mais, c’est sans doute l’intensité et la virulence qui émanent des situations de protection de l’enfance qui impressionnent le plus. Le glauque s’entremêle avec le sordide, la souffrance avec l’adversité, l’indigence avec la crasse. Le scénario déployé semble entaché de surréalisme, de baroque et de fantaisie morbide. Et pourtant, combien il est réaliste ! S’il fallait lire un livre, pour se convaincre de la mission vitale et capitale d’une protection de l’enfance pourtant pas exempte de dérives, c’est celui-là qu’il faudrait choisir entre beaucoup. Pour sa profonde humanité traversée d’un humour ravageur, son écriture fluide et son rythme qui ne faiblit jamais, voilà un roman incontournable. Une pépite à lire sans tarder.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1324 ■ 04/10/2022