Pédagogie et travail social. Pour un accompagnement émancipateur des individus et des groupes

DEPENNE Dominique, Ed. Dunod, 2015, 160 p.

La volonté émancipatrice qui fonde l’éthique du travail social est-elle compatible avec l’idéologie néo-libérale prônant la rentabilité, la compétitivité et la logique de prestation de service ? Non, affirme avec conviction Dominique Depenne qui dénonce la position de maîtrise sur autrui et la prétention à savoir ce qui est bien pour l’autre qui en découlent. Sa démonstration s’appuie sur une étude attentive des philosophes et pédagogues qui se confrontent depuis des siècles. D’un côté, une éducation traditionnelle qui enferme le sujet dans des carcans moraux et des savoirs inculqués par un maître tout puissant, n’admettant ni questions, ni discussions. Cette orthopédagogie descendante et autoritaire a pour fonction de dresser les esprits naissants et redresser ceux qui dévient, en les modelant pour les rendre conformes à l’exigence de soumission et d’assimilation de ce qu’on veut leur faire ingurgiter. L’auteur s’en prend à l’un des chantres de cette approche, Émile Durkheim, qui considérait l’individualité comme source de désordre et d’anomie. Il lui préfère un Georges Palante qui revendique une éducation individualisée source d’énergie et d’oxygénation. Placer l’individu au centre de la relation éducative, tel est le fondement des pédagogies actives qui prennent en considération les potentialités de chacun et recherchent le développement de sa créativité et son épanouissement. Le destinataire de la démarche pédagogique se réduit-il à un vide qu’il serait nécessaire de combler ou est-il doté de capacités individuelles, de potentialités singulières et de créativité naturelle qui ne demandent qu’à se déployer ? Le pédagogue doit choisir entre la posture d’éleveur-dresseur qui inculque et celle d’éleveur-émancipateur qui accompagne autrui comme un autre soi-même.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1183 ■ 14/04/2016