En finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté
ATD Quart monde, éd. Quart monde et Ed. de l’Atelier, 2013, 188 p.
Voilà un ouvrage qui déconstruit, avec précision et concision un certain nombre d’idées reçues sur la pauvreté. S’abreuvant aux meilleures sources statistiques et aux travaux les plus approfondis des chercheurs, il rétablit un certain nombre de vérités. Ce n’est pas vrai que les pauvres ne cherchent pas à s’en sortir parce qu’ils vivraient mieux avec le RSA et les allocations qu’avec un SMIC : des calculs détaillés établissent un écart allant de 500 à 800 euros, au bénéfice des salariés. C’est faux de prétendre que la fraude dont une petite minorité se rende coupable serait onéreuse : si elle coûte quatre milliards à la société, c’est moins que les onze milliard d’économies liés aux droits sociaux jamais réclamés. C’est une erreur de penser que les pauvres fument et boivent plus que les autres : les 10% de ménages les moins fortunés consacrent 525 euros par an à ces consommations, contre 704 euros pour un ménage moyen. Ce n’est pas vrai que les SDF on choisi leur vie. Ils la subissent, seule une poignée affirmant vouloir rester dans leur misère. C’est faux de prétendre que les SDF souffrant de troubles mentaux seraient violents. Les personnes malades psychiques sont douze fois plus victimes d’agression physique et cent trente fois plus victimes de vols que leurs concitoyens. C’est une erreur de penser que les SDF sont avant tout des personnes seules : à Paris, la moitié des personnes hébergées par le 115 sont des familles. C’est faux de prétendre qu’il y a de plus en plus d’immigrés : leur nombre n’a augmenté que de 1% entre 1975 et 2008. Ce n’est pas vrai qu’ils coûtent cher à notre pays : en 2005, si l’immigration a coûté de 68 milliards, elle en a rapporté 72. C’est une erreur d’affirmer qu’à peine arrivés en France, ils perçoivent des allocations : il faut cinq années de titre de séjour pour prétendre au RSA et dix années pour le minimum vieillesse. C’est faux de prétendre que les Roms sont en situation irrégulière en France : comme tout citoyen européen, ils ont le droit de circuler librement sur notre territoire, pendant trois mois. Ce n’est pas vrai de penser qu’ils ne veulent pas travailler. Dès qu’on leur en donne la possibilité, la majorité trouvent un emploi et s’intègrent. C’est une erreur de prétendre qu’ils sont nomades : s’ils errent c’est parce qu’ils sont chassés d’un campement à un autre. Leur mode de vie est sédentaire, depuis des siècles. C’est quatre vingt huit préjugés qui sont ainsi passés au crible, faisant justice de bien des bêtises colportées… et une vérité : s’il faudrait vingt milliards d’euros, chaque année, pour maintenir les plus pauvres au-dessus du seuil de pauvreté, c’est l’équivalent de ce dont bénéficient annuellement, les 10% des plus riches, en réduction d’impôts.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1125 ■ 07/11/2013