Nos points faibles sont nos meilleurs atouts
GLADWELL Malcolm, Ed. Flammarion, 2014, 279 p.
Dans son style inimitable, mélange à la fois de récits insolites et de références fort bien documentées, Malcolm Gladwell nous propose une fois de plus une démonstration lumineuse, s’attachant cette fois-ci à illustrer une thèse qui lui tient à cœur : ce ne sont pas toujours les avantages qui produisent les plus belles réussites. A travers une multitude d’exemples qui nous font voyager de l’histoire mythique de David et Goliath aux bombardements allemands sur Londres, en passant par les écoles supérieures les plus réputées, l’histoire de vie des hauts responsables politiques ou encore le nombre d’élèves par classe, l’auteur se plaît à faire l’éloge de la fragilité. La sagesse populaire veut qu’une faiblesse constitue un écueil qu’il est préférable d’éviter, une épreuve qui ne peut que faire empirer la situation. Et pourtant, les désavantages peuvent parfois se transformer en avantages. Ainsi, c’est une erreur de croire que les expériences traumatisantes ne peuvent que compromettre l’avenir ou qu’un handicap vécu dans l’enfance bloque inévitablement le destin à l’âge adulte. Une étude portant sur l’histoire familiale d’un échantillon de premiers ministres anglais a démontré que 66 % d’entre eux avaient perdu un parent avant leurs 16 ans. Quant aux innombrables dyslexiques ayant réussi leur vie, ils n’y sont pas arrivés, en dépit de leur déficience, mais grâce à l’intelligence et la créativité qu’il leur a fallu déployer, pour y pallier. Si les enfants prodiges émergent des familles aisées, les génies sont le plus souvent issus de milieux aux conditions de vie bien plus défavorables. On conçoit trop souvent certaines conditions comme utiles et profitables, en passant à côté d’autres jugées trop rapidement comme peu favorables, alors qu’elles rendent plus forts et plus sages. Ne pas être dans la norme peut parfois donner la liberté de tenter l’inimaginable.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1178 ■ 04/02/2016