Sourd et certain

LAPLANE Vivien, Éd. Viviens Apprendre et écouter, 2019, 90 p.

Appareillé à 2 ans, oralisé à quatre, depuis son enfance ses parents ont tout misé sur son intégration. Ses treize ans d’orthophonie lui ont permis d’apprendre à parler distinctement, en articulant bien. Il porte son appareil auditif depuis 35 ans, sept jours sur sept et seize heures sur vingt-quatre. Et cela ne lui pose aucun problème. Pire, cela lui permet d’écouter le chant des oiseaux ou la mélodie d’une musique. Il le coupe juste quand un enfant crie ou que quelqu’un parle fort dans son téléphone. C’est grave, docteur ? Vivien Laplane fait partie de cette majorité de sourds qui ne se sent pas appartenir à ce « peuple » regroupant ceux de ses pairs pour qui l’oralité est une malédiction et la langue des signes la seule planche de salut. Refusant d’être réduit à cette identité, il revendique, avant le statut de malentendant, d’être une personne. La communication gestuelle, il la connaît. Il l’utilise quand ses piles tombent en panne. Mais, le silence total crée chez lui un fort sentiment d’insécurité. A l’inverse, le bruit l’épuise, les efforts pour distinguer les sons ayant du sens étant énergétivore. Faisant des efforts vers le monde des entendants, il en attend autant de leur part : se positionner bien en face, dégager son visage, répéter sans hausser la voix. « Conjuguons nos différences et nos ressemblances, nous trouverons toujours un moyen de nous entendre » affirme-t-il avec humour.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1267 ■ 18/02/2020