Tolérances et radicalisme: que n’avons-nous pas compris?
LAURENT Pierre Joseph (Sous la direction), Ed. Couleur Livres, 2016, 187 p.
Traiter les terroristes islamistes de barbares apaise la légitime colère que provoquent leurs actes. Mais, s’en contenter ne permet nullement de comprendre. Sortir de l’émotion et s’émanciper du leurre de l’explication unique susceptible à elle seule de traduire les raisons des actes posés : tel est le défi lancé et réussi par les chercheurs de l’Université catholique de Louvain. L’émergence de la radicalisation s’inscrit dans l’histoire, comme un variant anthropologique qui profite du contexte pour s’actualiser. Et l’actualité est marquée au coin de la confrontation d’un occident se déployant dans un temps séculier et s’abreuvant à la subjectivation et la rationalisation avec un monde musulman où s’entremêlent encore les registres temporel, religieux, social et politique. Même si la condition de jeunes issus de l’immigration ne prédispose pas au radicalisme (qui touche 1 sur 5.000 jeunes musulmans), l’identité humiliée incite à opérer une inversion du stigmate, transformant le mépris de soi en mépris de l’autre. Même si la misère et les inégalités sociales ne mènent pas au terrorisme, ce dernier surfe sur les vagues de l’amertume, de la frustration et de l’injustice. Même si la modernité est propice à la promotion et aux attentes individuelles, elle facilite aussi les incertitudes et donc les déceptions. C’est dans ce contexte global, que s’articulent les motivations spirituelles, morales, héroïques, nihilistes, altruistes, millénaristes et apocalyptiques qui relèvent tout autant d’une dynamique individuelle, familiale, groupale, nationale, que géographique, sociopolitique, institutionnelle ou religieuse. Face à cette complexité qu’on ne peut approcher que du bout des doigts, il faut articuler toutes les explications possibles.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1203 ■ 16/03/2017