Femmes musulmanes: rencontres ici et là-bas
Josiane CRISCUOLO, Chronique Sociale, 2001, 126 p.
L’Islam a imposé, dans les régions où il s’est implanté, des règles qui ont mis un terme à des pratiques terribles aux yeux de la condition de la femme : comme par exemple tuer les filles à leur naissance en les enterrant vivantes, quand c’était un garçon qui était désiré. Pour autant, ce qui pouvait apparaître un progrès aux temps de l’Egire (VIIème siècle de l’ère chrétienne) a quelque chance d’apparaître dépassé près de 14 siècles après. Le Coran, texte écrit à une époque où la domination de la femme sur l’homme était quasiment universelle, justifie cet état de fait : « Les hommes ont autorité sur les femmes, en vertu de la préférence que Dieu leur a accordé sur elles… Admonestez celles dont vous craignez l’infidélité, reléguez-les dans les chambres à part et frappez-les » (verset 34). La famille traditionnelle établit une pyramide telle que « sous le musulman il y a la musulmane et les petits musulmans, sous le garçon il y a la sœur, sous la fille il n’y a personne et tous sont au-dessus d’elle. Chacune des strates de la pyramide doit rendre compte de ses agissements à celle qui la précède… » (Florence Assouline citée p. 87). La revendication des femmes -qu’elles soient, d’ailleurs, musulmanes ou non - à exister en tant que personne et citoyenne pousse à une lecture plus moderne du Texte Saint. En la matière, il convient de sortir des stéréotypes véhiculés le plus souvent. On présente souvent les femmes musulmanes comme silencieuses. Mais elles ne le sont que parce qu’on ne songe pas à les écouter. Si on leur donne la parole, comme le fait Josiane Criscuolo, on s’aperçoit de l’extrême diversité de leur vécu.
Bien sûr, on trouve cette femme soumise à ses parents, puis à son mari et enfin à ses fils, qui restera dans la frustration toute sa vie, à qui l’on refusera tout épanouissement personnel et qu’on limitera aux tâches ménagères et à l’élevage d’une nombreuse progéniture. Mais on rencontre aussi ce couple musulman où la femme, très occupée par son activité professionnelle, confie à son mari la charge de l’éducation des enfants. Le mariage tout comme le travail peuvent être des facteurs d’émancipation, permettant à la jeune femme d’échapper à la pression de son milieu familial et de trouver sa liberté. Beaucoup de jeunes filles musulmanes affirment avoir une vie sexuelle tout à fait normale avant le mariage comme leurs consœurs des sociétés occidentales et ce, malgré l’exigence de la virginité avant le mariage. C’est l’une des conséquences de l’écartèlement entre deux cultures : celle de la famille et celle du pays d’accueil. Ces manifestations d’émancipation ne se font pas au détriment de la pratique religieuse. Nombre de femmes affirment respecter le ramadan, les sept prières par jour et le pèlerinage à La Mecque, tout en exigeant le respect de leurs droits.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°597 ■ 15/11/2001