La Laïcité

Claude DURAND-PRINBORGNE, Dalloz, 2004, 203 p.

Ce que la loi de 1905 définit, c’est bien le cantonnement des croyances à la seule sphère privée. Deux principes complémentaires en charpentent l’application : l’Etat n’exerce aucun pouvoir religieux et la religion aucun pouvoir politique. « La préservation d’une sphère publique échappant à toute emprise confessionnelle valorise ce qui est commun à tous, mais en même temps elle protège l’espace privé de chacun » explique l’auteur (p.14) continuant, en expliquant  que « l’enseignement est laïc, non parce qu’il interdit l’expression des différentes fois, mais au contraire, parce qu’il les tolère toutes » (p.18) La laïcité ne se confond donc pas avec l’anticléricalisme, comme l’ont cru certains maires qui, au début du XXème  siècle, ont voulu interdire les processions, les sonneries des cloches dominicales ou le port du costume ecclésiastique ! La non-reconnaissance d’aucun culte en particulier permet de les placer tous sur le même pied d’égalité quant au traitement que leur réserve un Etat qui se veut neutre et impartial. Conséquences : déconfessionnalisation de l’école et des cimetières (1882), des hôpitaux (1885), des personnels enseignants (1886) et même suppression, en 1884, de la prière  qui ouvrait traditionnellement toutes les sessions parlementaires. Le principe laïc trouvera enfin sa consécration dans les constitutions de 1945 et de 1958. Le débat autour de cette notion « qui sent la poudre » (Jean Rivero) est passé au fil des années, de la chambre de députés aux prétoires et aux tribunaux. Ainsi, de la règle d’abstention de tout financement en matière de cultes, qui a permis la condamnation par le Tribunal Administratif, des subventions attribuées par des collectivités publiques à l’occasion de voyages du Pape. Exception notable toutefois, celle des départements de Moselle du Haut Rhin et du Bas Rhin qui, en réintégrant le giron national en 1918, ont gardé un régime spécifique concordataire. Ce qui leur permet de financer les religions, voire même la construction d’une mosquée à Strasbourg. Autre particularité, l’entretien des bâtiments cultuels qui reste du ressort des municipalités. Mais, c’est aussi ce même principe de laïcité (qui garantit la pratique religieuse) qui permet de financer le fonctionnement des aumôneries au sein des établissements scolaires et l’expression pluraliste des différents cultes au sein du service public de radio-télévision. On est bien là dans le souci de respect des différences et d’ouverture à la diversité des cultures. Pour autant, tolérance ne signifie pas permissivité totale : sont ainsi intervenues plusieurs décisions judiciaires protégeant des mineurs contre l’action de certaines sectes. « Il revient à l’Etat d’assurer l’ordre public, toute manifestation d’opinion étant acceptable autant qu’elle ne troubler pas cet ordre » (p.31). Les seules restrictions qui puissent intervenir concernent la garantie de la sécurité, de la santé, de la morale et la protection des droits et des libertés de chacun.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°755 ■ 02/06/2005