Dieu n’est pas grand. Comment la religion empoisonne tout
HITCHENS Christopher, Belfond, 2009, 321 p.
Depuis quelques années, toute une littérature fleurit, faisant la part belle à l’athéisme, à l’ouverture d’esprit et au libre examen critique. Face à des religions défendant bec et ongle leur droit de regard sur la société, rien n’est plus légitime que le droit d’inventaire sur leurs différentes doctrines. C’est ce que nous propose ici un Christopher Hitchens, affirmant d’emblée que les croyants peuvent bien croire en ce qu’ils veulent, du moment qu’ils ne l’imposent pas au reste de l’humanité. Malheureusement, c’est exactement l’inverse qui s’est passé. Si les différents cultes tendent volontiers les mains aujourd’hui, en offrant consolation, solidarité et élévation morale, c’est pour mieux faire oublier la barbarie avec laquelle ils se sont conduits, quand ils étaient tous puissants. Et de rappeler cette église catholique qui brûla et interdit les écrits de l’antiquité, au prétexte qu’il ne pouvait y avoir de réflexion philosophique valable avant la venue de Jésus. Ce qui lui permit de faire émerger les vraies questions, essentielles et fondatrices de toute pensée : quelle est la longueur des ailes des anges ou encore quel est le nombre de créatures mythiques pouvant danser sur la pointe d’une aiguille ? Autre apport indispensable de la recherche scientifique chrétienne : l’inénarrable calcul réalisé au 17ème siècle par l’archevêque irlandais James Ussher qui permit enfin de savoir depuis combien de temps le monde existait : il réussit ainsi l’exploit de trouver que notre monde était né le dimanche 22 octobre de l’an 4004 avant JC, à 18h00 ! Rien d’étonnant à tout cela, si l’on pense à l’époque d’ignorance abyssale où vivaient les pères de la foi. D’où la dimension souvent science fiction déjantée de certains passages. Les auteurs des quatre évangiles officiels ne sont d’accord que sur peu de choses, tant leur récit est contradictoire. Le texte sacré des juifs n’est pas en reste : il fourmille d’appels au meurtre, au viol et au génocide, actes choquants certes, mais totalement banals à l’époque. Quant au Coran, il fut rédigé après que le prophète qui l’avait inspiré soit mort et deux siècles avant que la langue arabe ne se soit stabilisée et unifiée. Ces textes, souvent imprécis et approximatifs, ont été expurgés et modifiés pour répondre aux nécessités politiques de l’époque, ce qui n’empêche pas de les considérer aujourd’hui comme l’expression sacrée de la parole de Dieu ! Forte charge contre la religion, cette démonstration pèche toutefois par pessimisme, semblant exclure qu’on puisse aussi vivre sa foi dans le respect d’autrui, ce qu’il ne démontre pas.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°966 ■ 25/03/2010