Mission Emploi & Handicap - 44
Regarder le salarié handicapé du côté de ses compétences et non de ses déficiences
On le sait, l’emploi des personnes handicapées, tant dans le privé que dans le public est loin d’avoir atteint les objectifs fixés. Certains partenaires se sont mobilisés ces dernières années pour tenter d’y remédier. Efforts de fourmi certes, mais qui ont au moins le mérite d’exister.
L’Union européenne compte 37 millions de personnes handicapées mais ne garantit un travail qu’à 42 % d’entre elles. Entre une Espagne à 25 % et une Allemagne à 50%, la France se situe à un taux de 45,5 %. La loi de 1987 contraint toute entreprise de plus de 20 salariés à une obligation d’emploi, à hauteur de 6 % de son effectif. Le rapport du Conseil économique et social rappelait, en juin 2003, que ce taux ne dépassait pas, selon les départements, un chiffre compris entre 3 et 4,5%. En revanche, un nombre appréciable de travailleurs handicapés sont employés par des entreprises de moins de 20 salariés, non assujetties à l'obligation légale. Ce sont ces employeurs que regroupe la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises (CGPME), organisation patronale forte de 1.500.000 adhérents. En juin 1995, sa délégation de Loire-Atlantique, a répondu favorablement aux sollicitations de l’AGEFIPH et a créé une mission Emploi & Handicap. Jacqueline Guiheneuf, chargée de cette mission, se voit confier la tâche de favoriser l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés en milieu de travail ordinaire, en informant, sensibilisant et fidélisant les entreprises autour de leur emploi. L’action de fond commence alors : diffusion de documentations, interventions dans les réunions organisées par le syndicat ou lors de son assemblée générale annuelle, rencontres spécifiques avec des employeurs, contacts téléphoniques, etc... sur un même thème : « A compétences égales, pourquoi pas une personne handicapée ? » C’est 200 à 300 entreprises qui, chaque année, répondent favorablement aux propositions de rendez-vous. Les chefs d’entreprise n’apparaissent pas forcément réticents face au handicap. Bien au contraire, les obstacles qui ont du être dépassés par les personnes handicapées leur semblent en général être un gage d’une plus grande motivation et d’une plus grande combativité qui ne peuvent être que profitables à l’entreprise. Plusieurs hésitations toutefois reviennent régulièrement, au premier rang desquelles on retrouve souvent la crainte que le handicap ne soit un frein à la polyvalence. Une petite entreprise peut évoluer très rapidement et demander à ses salariés de changer de poste de travail : la personne handicapée pourra-t-elle s’y plier ? D’autant que le niveau de qualification au moment du recrutement est, le plus souvent, moyen ou assez bas et ne se prête guère à cette polyvalence souhaitée. Autre inquiétude, celle liée au caractère évolutif du handicap : l’état de santé du salarié ne risque-t-il pas de s’aggraver avec le temps ? Et puis, il y a l’aménagement des situations de travail qui parfois pose problème : l’ergonomie ne fait pas toujours partie des préoccupations premières de l’entreprise. Parmi les autres réticences, on compte la déception d’une embauche antérieure qui ne s’est pas bien passée ou encore les difficultés supplémentaires à se séparer d’un salarié porteur de handicap, une fois celui-ci embauché. Il arrive aussi, parfois, que ce soit les salariés en poste ou l’encadrement qui freine, par méfiance d’une déficience dont les caractéristiques restent largement méconnues. Mais ce ne sont jamais les subventions proposées pour recruter des personnels porteurs de handicap qui décident les entrepreneurs. Bien conseillés et appuyés par la chargée de mission de leur syndicat, il leur arrive de choisir de faire appel à du personnel handicapé. Un formulaire est alors rempli, puis adressé aux services spécialisés (tels les CAP emploi) C’est une cinquantaine d’offres qui sont ainsi recueillies chaque année. Seul un tiers se concrétise par le placement de personnes reconnues travailleurs handicapés COTOREP : parce que les candidatures n’ont pas répondu au profil demandé (manque de formation ou d’expérience) ou encore que les qualités requises ne sont pas au rendez-vous (pas l’autonomie ou de sens de l’accueil suffisants,…). Il faut dire que les candidats porteurs de handicap se présentent aux côtés d’autres salariés qui postulent pour le même poste. Mais, il arrive aussi que le travailleur handicapé soit recruté avec, à la clé, une adaptation du poste de travail financé par l’AGEFIPH : véhicule professionnel transformé en fonction d’un handicap moteur, commande à synthèse vocale et clavier d’ordinateur en braille, pour non-voyant etc... L’action de Jacqueline Guiheneuf ne s’est pas arrêtée là. Elle a pris l’initiative d’organiser des « face à face » entre chefs d’entreprise et personnes handicapées « chercheurs » d’emplois. Cela se passe au cours de petits-déjeuners mensuels regroupant une vingtaine de participants pour des échanges informels. L’occasion pour les uns et les autres de « tout se dire », de faire tomber les à priori, de démystifier les représentations réciproques. Les chefs d’entreprise écoutent le vécu de leurs interlocuteurs, comment ils sont reçus en entretien, les difficultés qu’ils ont parfois à rencontrer la bonne personne. Les demandeurs d’emploi, quant à eux, entendent les employeurs exprimer leurs exigences : « obligation de trouver le collaborateur compétent ». Quatre de ces petits-déjeuners ont eu lieu en 2002. Les huit programmés pour cette année ont déjà eu lieu. Le prochain aura lieu le 19 novembre, pendant la « Semaine Nationale pour l’Emploi des personnes handicapées ». Certaines de ces rencontres ont entraîné des recrutements, soit directement par les mises en relations des employeurs présents, soit grâce aux effets de re-dynamisation induits. Les actions évoquées ici ne représentent qu’une « goutte d’eau », au regard des efforts encore nécessaires. Rien qu’à l’échelle du département, la CGPME regroupe 1.000 adhérents directs, non comprises les entreprises des organisations professionnelles affiliées, sur 27.000 entrepreneurs !
Reste une démarche qui, même réalisée à bas bruit et portant de modestes fruits, justifie d’être saluée !Contact : Jacqueline GUIHENEUF, Chargée de Mission Emploi & Handicap
Tél./Fax : 02.40.52.53.43 - E-mail : emploihandicap@cgpmepdl.orgVoir Calendrier des « Petits-déjeuners Emploi & Handicap » : www.cgpmepdl.org
Qu’est-ce que l'AGEFIPH ?
L’Association nationale pour la Gestion du Fond pour l’Insertion des Personnes Handicapées est issue de la loi du 10 juillet 1987 qui permet aux entreprises de plus de 20 salariés de s’aquitter– totalement ou partiellement - de leur obligation d’employer des travailleurs handicapés en versant une contribution financière. Les sommes collectées financent des actions en faveur de l’accès des travailleurs handicapés au milieu ordinaire de travail ou de leur maintien dans l’emploi. 17 mesures sont ainsi répertoriées, axées majoritairement sur l'emploi en milieu ordinaire : financement d’études, de diagnostic et de conseils en matière d’emploi de personnes handicapées, prime à l’embauche dès la signature d'un contrat de travail, subvention forfaitaire pour compenser les coûts de reclassement interne d’un salarié en voie d’être inapte, financement d'études ergonomiques et de réalisation d'aménagements techniques des postes de travail ou de l’accessibilité des locaux, subvention dans le cadre de contrats en alternance ou en apprentissage etc...
AGEFIPH : 192 avenue Aristide Briand 92226 Bagneux Cedex (18 délégations régionales)
www.agefiph.asso.fr
Un taux de chômage sans commune mesure
« Appelant par essence des capacités productives qu’il désire maxima, le monde du travail se révèle naturellement réticent à accueillir des travailleurs handicapés : 38 % des entreprises assujetties au regard de la Loi de 1987 ne comptent aucun travailleur concerné dans leurs effectifs et 35 %, incomplètement par rapport à leur obligation.
Le taux d’emploi oscille toujours autour du taux de 4 % et les flux d’embauche de T.H restent toujours inférieurs au flux de travailleurs valides tandis que la durée de chômage reste toujours largement supérieure. En revanche, le fait que 100 à 110 000 personnes sont reconnues travailleurs handicapés chaque année par les Cotorep – seule une partie d’entre eux sont en situation d’emploi lors de cette R.Q.T.H – laisse rêveur sur le nombre de personnes handicapées en situation de travailler et qui n’ont pas d’emploi ! »
Vincent Assante : « Situations de handicap et cadre de vie » rapport au Conseil économique et social.
Jacques Trémintin - LIEN SOCIAL ■ n°687 ■ 20/11/2003