Fais ce que je te dis, pas ce que je fais
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dans Billets d'humeur
Mathias se voit reprocher de ne pas téléphoner à ses parents quand il est en retard. Il en a conscience. Mais, au moment de composer leur numéro, il bloque. Lilian doit envoyer sa lettre de motivation pour un stage. Sa mère a plié le courrier et lui a préparé l’enveloppe. Il ne lui reste plus qu’à mettre un timbre et à glisser la missive dans la boite aux lettres juste en face de la maison. Le moment venu, il bloque. Maëlis ne met toujours pas son linge sale dans la panière de la salle de bain. Mille fois, sa mère le lui a demandé. Mille fois, il a bloqué, le laissant traîner. Bien sûr, il y a cette opposition à l’autorité qui cherche et trouve inconsciemment (ou pas) une façon de s’affirmer. Mais, plus prosaïquement, quand on interroge les mômes sur leur obstruction, on obtient souvent la même réponse : l’inénarrable et incontournable « la flemme ! » Mauvais prétexte réagit l’adulte qui réplique qu’une telle attitude n’est pas normale. Que lui-même ait retardé le moment où il s’était promis de trier et ranger ses papiers administratifs qui s’accumulent, qu’il ait reporté à plus tard le grand ménage qu’il avait pourtant programmé d’effectuer ce week-end, qu’il ait ajourné cette visite prévue depuis longtemps à la belle-mère ne peut bien sûr pas être comparé. Il est adulte et sait ce qu’il fait. Mais que son enfant, à son niveau fasse pareil, c’est inquiétant ! Rappelons qu’il est normal de pleurer quand on est triste, de traîner à faire quelque chose quand cela ne nous plait pas, de mentir pour ne pas perdre la face, de préférer jouer que de faire ses devoirs, de laisser tout en vrac plutôt que de ranger. Reconnaître la légitimité de la procrastination ne signifie s’y soumettre et renoncer à changer. C’est simplement prendre conscience d’une réalité universelle : il faut presque autant d’énergie pour imposer à son enfant d’accomplir des tâches que de volonté pour se forcer soi-même à effectuer une corvée qui nous déplait !
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1266 ■ 04/02/2020