Chapeau bas, messieurs!

En mars 2012, un technicien d’ERDF avait été menacé de licenciement par son employeur pour avoir refusé de limiter la consommation d'énergie chez une dizaine d'usagers en situation de précarité. La mobilisation syndicale et les 33.792 signatures d’une pétition diffusée par la CGT avaient fait reculer la direction. En avril 2013, c’est un employé de Veolia d’Avignon qui vient d’être licencié, pour avoir refusé de couper l’eau au domicile d’un millier de familles défavorisées, préférant négocier avec elles pour les aider à apurer leurs dettes. En droit pénal, la théorie dite des « baïonnettes intelligentes » sanctionne toute obéissance à un ordre manifestement illégal. Cela s’applique même à la fonction militaire qui nécessite pourtant soumission et discipline aveugle. Il n’est pas encore établi que le refus de suspendre la fourniture d’énergie puisse relever de cette objection morale. En attendant que les prud’hommes tranchent, on ne peut que rendre hommage à la décision de ces salariés d’avoir agi en conscience, refusant d’aggraver les conditions de (sur)vie de familles en difficulté. Penser qu’une situation est inique ou injuste constitue une saine réaction. Le dire ouvertement et protester relève d’un cran supplémentaire dans la réactivité. Mais, s’engager personnellement, en mettant en jeu son emploi, plutôt que d’accomplir ce que l’on réprouve apparaît comme acte particulièrement valeureux. J’aimerais pouvoir affirmer ici que j’aurai eu ce courage !

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1105 ■ 16/05/2013