La chasse au parent est ouverte
Il allait chercher ses deux fils, âgés de 6 et 8 ans, à l’école. Il n’en a pas eu le temps. Contrôlé par la police, ce papa arrivé du Daghestan en 2008 et débouté du droit d’asile s’est retrouvé en centre de rétention administratif. Finalement, Nadir sera libéré après 48 heures, le juge de la liberté et de la détention ayant jugé irrégulières les conditions de son interpellation. Ce scénario, malheureusement récurrent, inspire deux réflexions. La première concerne le sale boulot que l’on charge les fonctionnaires de police d’accomplir. On se demande s’ils n’ont pas autre chose à faire de plus utile, que de pourchasser ainsi cet aussi redoutable délinquant, dont tout le monde se plaît à dire qu’il s’est parfaitement intégré, depuis trois ans. Second constat, cette même population qu’on dit tentée par des réflexes xénophobes s’est mobilisée et relayée auprès de Nariman et Ramazan, pour les protéger de la police, les deux enfants ayant continué à fréquenter l’école, pendant que leur mère restait cachée. Un goûter solidaire a même été organisé devant la préfecture, par des parents d’élèves, pour protester contre une arrestation, à leurs yeux, révoltante. C’est qu’affirmer, abstraitement, qu’il y a trop d’immigrés est une chose. Apprendre que le charmant papa des copains de ses enfants, que l’on croise chaque soir à la sortie de l’école, vient d’être raflé, en est une autre. Autrui n’est plus ni un inconnu, ni un étranger. C’est un peu un autre soi.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1024 ■ 30/06/2011