Les discriminations

Lutter contre toutes les discriminations

L’animateur est le spécialiste du tiers temps, ce moment des loisirs placé entre la famille et l’école. Il participe au même titre que les parents et les enseignants à l’éducation du petit d’homme. L’un de ses rôles essentiels consiste à accompagner l’enfant au travers des jeux, des activités manuelles, intellectuelles ou physiques dans la découverte de l’autre, l’acceptation des différences et l’apprentissage du « vivre ensemble ». Démarche qui se heurte à l’intolérance et aux discriminations. Mieux comprendre ces obstacles pour mieux savoir les dépasser : tel est l’objectif de ce dossier.

 

Pourquoi les discriminations ?

Les comportements discriminatoires présentent une dimension irrationnelle qui semble bien peu sensible au raisonnement logique et aux arguments cartésiens. Qui n’a pas vécu cet étrange dialogue qui voit la personne revenir à sa position initiale, malgré un brillant discours qui en a pourtant démontré l’absurdité.  Comment réussir alors à contrer cet argumentaire ? Peut-être en essayant d’en comprendre les dimensions à la fois psychoaffectives, culturelles et historiques qui loin de se contredire ne peuvent que se compléter.

L’accompagnement de l’enfant dans sa découverte de l’autre, dans l’acceptation des différences et l’apprentissage du « vivre ensemble   se heurte à l’intolérance et aux discriminations. Mieux comprendre ces obstacles pour mieux savoir les dépasser.

Pour les uns, la discrimination serait le propre de l’homme, pour les autres, il serait le résultat d’un déficit d’éducation. Deux théories partielles qui n’expliquent pas pour la première pourquoi les peuples allemand et français après s’être massacrés dans trois terribles guerres sont devenus aujourd’hui amis, ni pour la seconde pourquoi le racisme a surtout historiquement sévi chez les peuples dits les plus civilisés. Il  faut sans doute préférer un faisceau de facteurs à une explication unique.

 

L’homme : un être de nature ...

La peur de l’inconnu est sans doute l’une des émotions les plus répandues dans le monde animal. On l’observe très bien, par exemple, chez un chien ou un chat qui ne vous est pas familier, et qui, à votre approche, s’il se sent inquiété, adopte une stratégie de fuite ou au contraire d’attaque, selon que la distance qui vous sépare de lui, lui permet de s’échapper ou au contraire le contraint à une défense agressive. On distingue un troisième comportement lié au stress ressenti et qui se traduit au contraire par l’inhibition de toute action qui se traduit alors par une paralysie et une tétanisation sur place, comme si en ne bougeant pas, il s’agissait de passer inaperçu. Ces comportements n’ont rien d’étonnants. Ils correspondent à des millions d’années d’adaptation des espèces, dans leur lutte contre les prédateurs qui les menacent.  L’être humain appartenant avant tout au monde animal, il fonctionne selon un certain nombre de réflexes instinctifs dont il a hérité de la lointaine époque où il devait défendre sa vie dans la savane. On retrouve d’ailleurs encore cette méfiance face à l’inconnu, dans le refus des enfants de goûter ce qu’il ne connaisse pas. C’est sans doute grâce à ce soupçon systématique que notre espèce a pu survivre, en n’ingérant qu’avec parcimonie et réserve ce qui pouvait apparaître comme comestible mais qui pouvait s’avérer un poison violent. Ce comportement primitif reste encore imprégné très profondément en nous. Mais parce que l’homme est avant tout un être social, il est aussi complètement dépendant des conditionnements qui lui ont été inculqués dès sa naissance.

 

... et de culture

«  Dit bonjour à la dame » lui a seriné sa mère toute son enfance ou au contraire « n’adresse jamais la parole à quelqu’un que tu ne connais pas ». Selon qu’il a vécu dans une famille repliée sur elle-même, ne recevant que rarement des visites ou dans un réseau largement ouvert au monde extérieur (amis qui viennent ou chez qui l’on va, voyages, rencontres fréquentes avec des milieux différents ...), la personne va être préparée ou au contraire être réticente à aller vers l’autre. A ces particularités plus individuelles, il faut rajouter l’habitude collective propre à toute société et qui consiste à cimenter les liens qui unissent ses membres à partir de mythes communs, de légendes fondatrices et de coutumes spécifiques. Toutes ces constructions servant à pérenniser son existence, chaque communauté cherche aussi à se protéger contre les influences extérieures qui pourraient représenter une menace, en venant tenter de la démanteler. Nombre de peuples ont inventé dans leur langue des mots distincts pour désigner ce qui sert à identifier leurs membres de ceux qui ne le sont pas, à l’image des romains qui distinguaient leur peuple des « barbares », terme désignant  les étrangers sans que s’y ajoutent les connotations de fruste et de sauvage acquis depuis. On retrouve ce même réflexe au sein des collectifs plus réduits ou au contraire plus vastes que sont les écoles de pensée ou les religions.

 

L’intolérance : un atavisme propre à toutes les sociétés ?

Certaines d’entre elles comme le bouddhisme du Daïla Lama proclame l’ouverture aux autres croyances, l’échange avec des cultes différents, le partage des différentes fois. Convenons-en, les grandes doctrines spirituelles nous ont plutôt habitués, depuis des millénaires, à organiser la chasse aux hérétiques, aux apostats et autres incroyants (quand ce n’était pas les fidèles qui se massacraient entre eux). Il n’en va pas différemment des disciplines issues des sciences humaines. Le psychothérapeute américain Karl Rogers a toujours refusé, de son vivant, de créer une association internationale qui risquait à son avis de fossiliser sa pensée. Aux lendemains de sa mort, ses sympathisants se regroupèrent. Il ne fallut que quelques années pour que la nouvelle association ne scissionne, les novateurs s’opposant aux orthodoxes. Mais la plupart des brillants penseurs qui ont permis à la science du fonctionnement de l’être humain et de ses sociétés de connaître des progrès considérables n’ont pas eu la sagesse de Rogers et sont tombés dans le même travers : transformer leurs découvertes qui ne pouvaient n’être que partielles et limitées, rajoutant une nouvelle pierre à l’édifice éternellement incomplet de la connaissance, en la nouvelle pierre philosophale destinée à apporter l’interprétation ultime. Tout se passe donc comme si, pour le genre humain, les discriminations n’étaient qu’une des expressions de l’intolérance fondamentale et radicale qui oppose les sociétés humaines entre elles, chacune affirmant détenir la vérité absolue en matière de culture, de coutumes et de préférence mystique, et surtout prétendant que ses choix les placent en position de supériorité par rapport à l’autre.

 

Les différentes formes de discrimination

Mais cette hypothèse n’est pas à son tour complètement satisfaisante. Car, elle ne permet pas de comprendre un mécanisme tout à fait singulier qui a fait son apparition finalement assez récemment. Confrontée à l’histoire des trois derniers millénaires, il est un constat qui ne laisse pas de surprendre. L’occident a connu une montée en puissance, comme jamais aucune civilisation avant lui n’en avait connu, d’une forme de discrimination particulière : le racisme. Avant de décrire ce phénomène, il convient de le distinguer des autres formes de rejet de la différence. Il est, en effet, nécessaire, d’établir une différence entre ce qui relève

de l’ethnocentrisme (le fait de considérer son ethnie comme supérieure aux autres), de la xénophobie (l’attitude qui consiste à rejeter tout ce qui est étranger), du fanatisme religieux (la prétention à posséder la seule foi authentique), de l’impérialisme (imposer un mode de vie considéré comme civilisateur aux autres peuples), du racialisme (considérer qu’il existe des caractères spécifiques et transmissibles propres à une catégorie particulière d’humains sans forcément en déduire une hiérarchie et une supériorité), du racisme proprement dit. « Il y a racisme quand un groupe ethnique domine, exclut ou cherche à éliminer un autre, sur la base des différences qu’il croit héréditaires ou fatales »(1) Or, ce comportement ne se manifeste qu’à compter du XVIIIème  siècle pour connaître une phase paroxystique au XXème !

 

Ce que nous apprend l’histoire

Dans l’antiquité, une distinction nette opposait les civilisés des barbares, sans que la couleur de peau ne joue aucun rôle particulier et ne serve de base aux jugements négatifs. On trouvait d’ailleurs des esclaves et des hommes libres porteurs de religions et de caractéristiques physiques les plus diverses. Ce qui comptait avant tout, c’était la distinction centrale entre la situation d’asservissement et de liberté. Avec l’avènement de la chrétienté et de son ambition universaliste, ce qui est recherché c’est la conversion : les préjugés étaient forts à l’encontre des juifs ou des musulmans. Mais ils n’étaient plus validés dès lors que l’individu avait été baptisé. La couleur noire de la peau n’a inspiré de la répugnance aux européens qu’après la généralisation de la mise en esclavage des africains qui a donc précédé et non suivi les convictions racistes. C’est d’abord des prétextes religieux qui ont fondé leur théorisation du racisme. Si la désignation du peuple juif comme assassin du Christ a donné un prétexte à l’antisémitisme, le changement de religion qui était imposé sous peine de mort, pour inadmissible qu’elle soit permettait théoriquement de faire disparaître toute discrimination une fois celle-ci réalisée. Il en est allé différemment du peuple noir, qui même converti, ne sortait pas pour autant de leur servitude. Les docteurs de la foi allèrent chercher un obscur verset de l’ancien testament qui rapportait que Cham, le fils de Noé ayant contemplé la nudité de son père et s’en être moqué, aurait déclenchant les foudres de Dieu. Pour l’être suprême aurait condamnée toute sa descendance à l’esclavage. Après avoir longtemps hésité, pour savoir qui pouvait bien être ces descendants de Cham, on trouva pratique de désigner justement ceux que l’on allait peu de temps après réduire justement à  l’état d’esclave.

 

La science au secours du racisme

Avec la montée du rationalisme et des Etats nations basés sur les principes de citoyenneté et d’égalité pour tous, on ne pouvait plus se contenter de la légende de Cham pour justifier du commerce triangulaire qui allait déporter plus de 11 millions d’africains vers le nouveau monde. C’est la science qui se chargea alors de démontrer l’infériorité de certaines catégories humaines. Les scientifiques ne sont pas des individus à part : ils sont à l’image de la société dans laquelle ils vivent. Ainsi, au XVIIIème siècle, quand les naturalistes se sont mis à nommer, classer, trier et hiérarchiser les organismes vivants, c’est tout naturellement qu’ils se sont mis à agir de même pour l’espèce humaine. Très vite ils se mirent à distinguer différentes races d’êtres humains. Très vite il leur sembla évident d’identifier une race supérieure et d’autres comme inférieures. Le célèbre naturaliste Georges Buffon affirmait ainsi « le nègre est à l’homme ce que l’âne est au cheval ». le non moins célèbre philosophe Emmanuel Kant renchérissant sur les Noirs qui devaient être classés au bas de l’échelle humaine. Très rares seront les intellectuels qui, à l’image de Condorcet, s’opposeront avec courage à cette perception qui s’avère largement répandue. L’idée d’une causalité et d’un rapport de détermination directe et immédiat entre le biologique d’un côté et le social, le culturel et le psychologique de l’autre, s’impose dans presque toute la pensée scientifique. Paul Broca, fondateur de l’école d’anthropologie, prétend quant à lui que « jamais un peuple à la peau noire, aux cheveux crépus et au visage prognathe n’a pu s’élever spontanément jusqu’à la civilisation »

 

Le XIXème en a rêvé, le XXème l’a réalisé

Les convictions qui commencent à s’accumuler dans des cercles de savants couverts de prix et de reconnaissances internationales (dont de nombreux Nobel) vont trouver une synthèse dans l’école eugéniste qui préconise la préservation de la race supérieure par la reproduction privilégiée des plus intelligents et la toute aussi inévitable élimination des êtres moralement inférieurs. L’idéologie qui va trouver son application à partir de 1933 dans l’Allemagne nazie et à partir de 1949 en Afrique du sud, avait commencé à sévir entre 1907 et 1913 dans une dizaine d’Etats américains qui appliquèrent une politique stérilisation des épileptiques, des schizophrènes, des toxicomanes et des déficients intellectuels. Si le Canada, la Suisse, la Suède et le Danemark  suivirent cette voie, la France l’évitera toujours, et ce malgré les incantations de notre compatriote Charles Richet, prix Nobel en 1913, qui considérait que la civilisation pervertissait la sélection naturelle, en donnant des avantages à des dégénérés qui ne le méritaient pas ! Les Etats du sud des USA, l’Allemagne nazie et l’Afrique du sud n’ont fait qu’appliquer les préconisations faites par les savants du siècle précédent, en interdisant les mariages interethniques, organisant par la loi la ségrégation au sein de la population, l’exclusion du vote quand celui-ci subsistait, rendant impossible l’accès à la fonction publique, organisant une répression implacable de toute opposition, les nazis se distinguant par une volonté délibérée d’extermination des races dites inférieures (juifs, tziganes, homosexuels, « dégénérés »). 

 

La science raciste, encore aujourd’hui

Si l’on peut, à juste titre se gausser du psychologue américain John Rushton qui fit en 1922 une étude sur le volume des casques militaires portés respectivement par les soldats blancs et les soldats noirs et en déduisit la supériorité des premiers sur les seconds, il ne faut pas croire que cela aie complètement disparu aujourd’hui, et que la communauté scientifique.   ait retrouvé toute sa sérénité. Bien que largement déconsidérées après que l’on ait constaté leur concrétisation sous le régime nazi, ces théories n’ont pas complètement disparu. A la fin des années 1970, il se trouvera deux universitaires, l’anglais Eysenk  et l’américain Jensen pour publier une étude prétendant démontrer que l’intelligence étant héréditaire et la race blanche étant supérieure, l’aide apportée aux noirs n’était que pure perte. En 1994, un livre vendu aux USA à 400.000 exemplaires « Intelligence et structures de classe dans la vie américaine » ( Herrnstein & Murray) reprendra les mêmes thèses d’une élite cognitive (bien entendu les blancs) et d’une catégorie de sujets intellectuellement limités (le citoyens noirs et hispaniques). Cette publication a provoqué de violentes réactions de la part d’un certain nombre de chercheurs et de spécialistes pas vraiment prêts à laisser salir ainsi la réputation de leur discipline. « Il est encore fécond le ventre d'où est sortie la bête immonde » affirmait Bertold Brecht. On peut continuer aujourd’hui à le dire.

 

En finir avec le concept de race

Une race est un ensemble d’individus qui se distingue des autres par un ou plusieurs caractères constants et transmissibles à leurs descendants. Le sens commun pousse à évoquer des critères immédiatement perceptibles (couleur de peau, des cheveux, forme du visage) pour classifier l’espèce humaine. Il y aurait une race noire, jaune, causasienne (blanche) qu’on distinguerait rien qu’en regardant la personne. De cette perception en apparence évidente, les généticiens ont fait justice. Ils ont démontré, en effet, que les millions de gènes qui compose notre patrimoine, seuls quelques dizaines correspondaient aux caractères extérieurs visibles (couleur de la peau, forme du nez, texture des cheveux). Si l’on se met à comparer l’équipement génétique de chacun dans sa globalité, alors deux habitants du même village en apparence très proches peuvent avoir plus de différences entre eux qu’avec un habitant de l’autre bout du monde. Il y a eu tellement de brassage depuis le début de l’aventure humaine qu’il est difficile de catégoriser des groupes humains qui partageraient suffisamment de caractères entre eux pour les mettre à part. « La distance biologique entre deux personnes d’un même groupe, d’un même village est si grande, qu’elle rend insignifiante la distance entre les moyennes de deux groupes, ce qui enlève tout contenu au concept de race » affirmait François Jacob (2). Dont acte : L’homme appartient à la classe des mammifères, à l’ordre des primates, à la famille des hominidés, au genre « homo » et à l’espèce «  sapiens ».

 

Un combat loin d’être gagné

Si la science a cessé d’être un soutien pour les discriminations, il reste une couche de préjugés qui est bien loin d’avoir disparu. En 2003, un sondage à l’échelle de l’Europe montrait que 33% des européens se reconnaissaient  racistes ou très racistes. En France, la même année, un autre sondage démontrait que  plus de six français sur dix pensaient qu’il avait « trop de personnes étrangères aujourd’hui en France », un cinquième qu’il y avait trop de juifs et 31% que ceux-ci avaient trop de pouvoir. (2)  Bien éloigné de ces conceptions, se trouve inscrits au fronton de notre République trois proclamations qui sont à la base du pacte social qui nous permet de vivre ensemble : liberté, égalité et fraternité. La liberté est cette faculté de penser, de croire, de dire, de faire et de se déplacer comme bon nous semble. Mais, cette possibilité n’est pas absolue, elle se heurte à la limite des lois votées démocratiquement. Cette restriction correspond au vieux principe qui veut que la liberté de chacun s’arrête là où commence celle des autres. Ainsi, le code pénal incrimine-t-il toute discrimination fondée sur l’appartenance ou la non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion. Les propos et comportements discriminatoires ne sont pas une opinion, mais un délit punissable. L’égalité implique qu’aucun citoyen ne peut se prévaloir d’un quelconque privilège par rapport à un autre. Cela ne veut pas dire bien sûr que tout le monde soit traité d’une manière strictement identique, notre société étant encore très marquée par les inégalités tant économiques que sociales ou culturelles. Cela signifie que toute discrimination basée sur une distinction quelle qu’elle soit est illégale. Reste la fraternité qui considère qu’au-delà des différences de culture, de couleur de peau ou de religion, nous partageons, toutes et tous, la même condition humaine. A l’aune de ce dernier principe, la discrimination n’a pas non plus sa place. Ce n’est pas le matin du grand soir qu’il faut attendre pour faire appliquer ces fondamentaux. C’est maintenant, partout, en toute occasion, inlassablement, sans jamais baisser la garde, en ne croyant pas un seul instant avoir obtenu victoire. Les préjugés sont comme les ronces qui repoussent aussitôt qu’on les a arrachées. Combattre dans le quotidien, au travail, en famille, dans les lois, dans les institutions, dans les religions, dans l'éducation tout réflexe discriminatoire, c’est le seul chemin pour préserver la solidarité, la tolérance, et la bienveillance qui ne s’usent que si on ne s’en sert pas.

 
(1) « Racisme, une histoire » George M. Fredrickson, éditions Liana Levi, 2003, p.189.
(2) « Penser le racisme. De la responsabilité des scientifiques » Michel Girod, Calmann Levy, 2004, p.21

 

Lire interview Ansault Christelle - Discrimination

 

Jacques Trémintin – Journal de L’Animation  ■ n°51 ■ sept 2004

 

 

La discrimination peut commencer de façon anodine par l’attribution de comportements héréditaires : les noirs seraient doués pour le sport et la musique, les juifs pour le commerce et la finance, les blancs pour le raisonnement logique et scientifique. Dans cette même logique, on pourrait imaginer que la couleur des yeux détermine des qualités : bleu pour le courage, noisette pour la générosité et marron pour les performances sexuelles ... Ces prétendues caractéristiques innées sont liées non au patrimoine génétique, mais à la culture, au milieu social, et à l’éducation dans lesquels chacun évolue.

 

 

 

Les distinctions faites au sein de l’espèce humaine ont provoqué de véritables abominations : la déportation ou le massacre de populations entières du seul fait de leur caractéristique physique, religieuse ou ethnique. Ces génocides ont concerné tout d’abord entre 70 et 80 millions d’indiens américains, 11 millions d’africains, 5,2 millions de juifs, plus d’1 million d’arméniens, 500.000 tziganes ... A la fin du siècle dernier, c’est au tour de 800.000 Tutsis d’être massacrés en l’espace de trois semaines. Plus près de nous, dans l’ex Yougoslavie 13.000 personnes furent massacrées dans la seule enclave de Srebenica.

 

 

 

Les comportements discriminatoires présentent une dimension irrationnelle qui semble bien peu sensible au raisonnement logique et aux arguments cartésiens. Qui n’a pas vécu cet étrange dialogue qui voit la personne revenir à sa position initiale, malgré un brillant discours qui en a pourtant démontré l’absurdité.  Comment réussir alors à contrer cet argumentaire ? Peut-être en essayant d’en comprendre les dimensions à la fois psychoaffectives, culturelles et historiques et d’adopter une attitude sans concessions, relevant chacun de ses dérapages et répondant à chacune de ses manifestations.

 

 

 

Fiche n°1 : L’arsenal juridique contre les comportements discriminatoires ou racistes

Provocation publiques: « Ceux qui, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans les lieux ou réunions publics, soit par des écrits (…) soit par tout moyen de communication audiovisuelle (…) auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée seront punis d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende » (Art. 23 .1 et 24 de la Loi du 29.7.1881, modifiés par la Loi du 1.7.1972 du 13.12.1985 et du 13.7.1990).

Diffamations : « La diffamation commise soit par des discours, cris ou menaces proférés dans les lieux ou réunions publics, soit par des écrits (…) soit par tout moyen de communication audiovisuelle envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, sera punie d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende » (Art. 32 alinéa 2,3 de la Loi du 29.7.1881, modifié par la Loi du 1.7.1972, complété par la Loi du 13.7.1990).

Injures racistes : L’injure commise envers les particuliers à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, lorsqu'elle n'a pas été précédée de provocation, sera punie d'un emprisonnement de 5 jours à deux mois et d'une amende » (Art. 33 alinéas 2,3,4 de la Loi du 29.7.1881, modifiés par les Loi du 1.7.1972 et du 13.7.1990).

Dans les lieux publics : « Est puni toute personne fournissant ou offrant de fournir un bien ou un service qui (…) l’aura refusé (…) à raison de l’origine de celui qui le requiert, de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de son handicap ou de son appartenance ou de sa non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. »

Dans l’emploi : « Est punie toute personne amenée par sa profession ou ses fonctions à employer, qui aura refusé d’embaucher ou aura licencié une personne à raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de son handicap ou de son appartenance ou de sa non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ou aura soumis une offre d’emploi à une condition fondée sur l’origine, le sexe ; les mœurs la situation de famille, l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (Art 416 du code pénal, modifié par les Lois du 1.7.1972, du 11.7.1975, du 25.7.1985, du 25.7.1987, du 13.1.1989 et du 13.7.1990).

Dans les services publics et l’administration : « Sera puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende ou de l'une de ces deux peines seulement, tout dépositaire de l’autorité publique ou citoyen chargé d’un ministère de service public qui, à raison l’origine d’une personne de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de son handicap ou de son appartenance ou de sa non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée lui aura refusé sciemment le bénéfice d’un droit auquel elle pouvait prétendre. Les mêmes peines sont applicables lorsque les fautes auront été commis à l'égard d'une association ou d'une société ou de leur membres à raison de l’origine, du sexe, de la situation de famille ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (Art 187-1 du code pénal, modifié par les Lois du 1.7.1972, du 11.7.1975 et du 25.7.1985).

 

Fiche n°2 : Etat de lieux du racisme en 2003

La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme a rendu public le 1er avril 2004 son rapport d’activité pour 2003. Le ministère de l’Intérieur fait état de 229 actes de violences commis en 2003 contre les personnes et les biens (contre 313 en 2002) et 600 menaces et propos racistes (contre 999 en 2002) soit une baisse globale d’environ 38% (il faut noter néanmoins que 2002 avait été une année record depuis plus de 10 ans).

Les régions les plus touchées sont le Nord, l’Ile-de-France et la Corse.

Le constat d’un développement des actes et violences racistes dans les établissements scolaires en 2002 est confirmé en 2003.

L’antisémitisme reste depuis 2000 majoritaire, par rapport aux autres formes de racisme, représentant 72% de l’ensemble (contre 60% l’année précédente). Fait particulièrement inquiétant, les agressions antisémites ont fait 21 blessés en 2003 (soit le chiffre le plus élevé depuis 1993) sur un total de 32 victimes de violences racistes. Les faits d’antisémitisme recensés se sont principalement déroulés en Ile-de-France avec 89 actes de violence et 267 menaces. Le lien avec les événements internationaux, apparu depuis l'année 2000 et le début de la deuxième Intifada dans les territoires occupés par Israël, se confirme en 2003 : ainsi, c'est au printemps, avec le déclenchement de la guerre en Irak, que les faits racistes et antisémites ont connu un pic (78 actes recensés pour les seuls mois de mars à mai). Cette corrélation, déjà relevée les deux années précédentes, est particulièrement nette dans l'examen des actes antisémites et, dans une moindre mesure, dans les faits frappant la population d'origine maghrébine.

Les autres formes de racisme connaissent également une certaine stagnation, avec 92 actions en 2003 contre 119 en 2002. Mais l'hostilité anti-maghrébins atteint un niveau particulièrement élevé : 81 % des violences constatées ont visé la population d'origine maghrébine, soit « le plus fort pourcentage depuis 1993 », note la CNCDH. La commission relève également un « inquiétant pourcentage » de faits à connotation hostile à l'islam avec 36 attaques ou menaces contre des lieux musulmans (mosquée, lieux de prière ou carré de cimetière). Le rapport démontre une « confusion croissante » entre le racisme anti-arabe et l'hostilité aux musulmans, soulignant les « amalgames » récurrents avec la délinquance dans les quartiers sensibles, le fondamentalisme ou le terrorisme.

Selon un sondage BVA réalisé fin 2003, la lutte contre le racisme passe de la 7ème position en 2002 à la 10ème parmi les « principales craintes pour la société française » (derrière notamment le chômage, l’insécurité, la pauvreté, le terrorisme, la drogue ou le Sida). Comme l’année précédente, l’antisémitisme n’arrive qu’en 15ème position mais sa réprobation par le corps social semble progresser.

Les personnes considérées comme les principales victimes du racisme sont les populations arabo-musulmanes, puis les immigrés et enfin les juifs. Le sondage révèle globalement un repli des stéréotypes racistes et une prise de conscience de la nécessité de combattre le racisme (64% contre 59% en 2002).

 

Fiche n°3 : Témoignage

J’ai encadré, au mois de juillet 2003, un séjour de 12-14 ans dans les Alpes. Les pré-ados provenaient de la région parisienne. C’était un groupe black-blanc-beur qui présentait une grande homogénéité. Les comportements étaient, à peu de chose prêt, identiques quelles que soient la couleur de la peau ou la religion. Il y avait une vraie fraternité, comme on peut en trouver parfois, dans un groupe d’enfants. Nous étions accueillis dans une maison de vacances aux côtés d’un groupe plus important que le nôtre, en provenance du département du Nord. Les équipes de direction ont tout de suite sympathisé. Leurs enfants étaient par contre monocolor. Un incident est survenu au cours de la première semaine. Un enfant de l’autre colonie a proféré une insulte raciste à l’encontre d’une pré-ado black de chez nous. Quand la jeune est venue m’en parler, je suis tout de suite allé rencontrer mon collègue directeur. Nous n’avons pas hésité un instant quant à la réaction à entreprendre. Nous avons conçu notre démarche en trois étapes. Nous avons, tout d’abord, organisé une confrontation entre l’enfant insulteur et les neuf jeunes blacks de mon groupe. Nous avons fait attention que ce ne soit pas un tribunal. L’offensée et l’offenseur se sont expliqués. J’ai demandé à l’enfant s’il voulait bien présenter ses excuses. Il a acquiescé. Je me suis ensuite tourné vers les jeunes de mon groupe, pour savoir s’ils acceptaient ces excuses. Ils ont donné leur accord. L’enfant a alors présenté ses excuses serrant la main, à ma demande, des cinq garçons et faisant la bise aux quatre filles. Deuxième étape de notre réaction : nous avons réuni les deux colonies et avons évoqué ce qui s’était passé et comment cela avait été résolu. J’ai évoqué rapidement la fraternité qui nous unissait au-delà de nos différences et mon collègue (maghrébin d’origine) a dit aussi quelques mots, présentant des excuses au nom de son groupe, à propos de ce qui s’était passé. Il a fini par déclarer : « pour montrer que ce que nous disons ne sont pas des paroles en l’air, je vais serrer la main à mon ami Thomas » Alors que nous échangions une poignée de main, tous les enfants se sont mis spontanément à applaudir. Je garde un souvenir intense et très ému de ce moment qui restera gravé dans ma mémoire, toute ma vie. Troisième étape de notre réaction : nous avons organisé un match de foot. J’ai insisté -et obtenu- que les deux colonies forment deux équipes non pas distinctes mais mélangées. Il ne s’agissait de retrouver dans la compétition sportive une rivalité que nous cherchions justement aplanir. Nous avons improvisé notre façon d’agir, en essayant de répondre au mieux à ce qui s’était passé. Ce qui comptait surtout, c’était d’éviter de banaliser ou de stigmatiser l’auteur de l’insulte. Je crois que nous avons réussi, à notre modeste échelle, à transformer un acte ignoble en une déclaration d’humanité et d’espoir.

 

Chaque année, chaque jour, chaque instant,
On doit éveiller à la reconnaissance et au respect de l'autre.
Notre responsabilité d'éducateur et notre conscience de citoyen
Toujours nous imposent vigilance et prévention.
Rien n'est plus fragile que l'idée de droits humains universels,
Et l'égale dignité de chacun doit être réaffirmée sans relâche.

Le racisme est une manifestation brutale de l'ignorance,
Et le refus global de l'identité singulière de l'autre.

Regards haineux, insultes grossières, attitudes méprisantes ou violences meurtrières :
Autant de réactions simplistes dont nous ne devons pas tolérer l'expression quotidienne.
Comme les stéréotypes imprègnent facilement les mentalités,
Il nous faut réagir en permanence,
Signaler les logiques discriminatoires pour mieux les dénoncer,
Manifester notre engagement quand il s'impose et, surtout,
Eduquer contre le racisme, chaque année, chaque jour, chaque instant.


(Texte rédigé par le collectif pour la semaine d ‘éducation contre le racisme - 1999)

 

 

 

Compléments

Trop parler du racisme, n’est ce pas prendre le risque de l’encourager ?

Comme tout phénomène de société le racisme est avant tout un sujet d’actualité (sport, faits divers, politique…) Il occupe l’espace public et prend diverses formes et allures dont autant de définitions : antisémitisme, racisme, xénophobie…

En parler c’est le reconnaître, c’est informer… mais c’est aussi prendre le risque de l’exposer à l’opinion publique qui en renverra une image plus ou moins objective. C’est aussi faire en sorte que les gens puissent s’exprimer sur le sujet, ce qui finalement conduit à un exutoire beaucoup moins néfaste que des « ratonnades » ou autres jeux scabreux à la mode.

Mais le problème porte plus sur la façon dont est transmise l’information et l’image que cette information renvoie. J’en veux pour preuve le mouvement créé dans les 80, présidé à l’époque par Harlem Désir et soutenue par François Mitterrand. Avec du recul, je crois que l’on peut constater aujourd’hui les effets pervers de ce mouvement. Certes, il a apporté des améliorations sur le plan juridique, par exemple dans l’accompagnement et la prise en charge de personnes victimes d’actes racistes sur leur lieu de travail…mais l’image qu’il a pu fournir à l’opinion publique au moment même où les « français » apprenaient à vivre en collectivité avec les autres communautés et en même temps les « découvraient » n’est pas très positive. On a opposé un systématique « Touche pas ! » à tout et n’importe quoi, fermant ainsi la porte au dialogue et en forçant l’acceptation à la différence. Certains y ont vu une « impunité zéro » pour certaines franges de la population, au moment aussi où pointaient des phénomènes comme le chômage, la parité, les droits sociaux…

La tendance actuelle des médias à ne souvent parler que de ce phénomène aux travers de documentaires « choc » ou faits divers sordides, ne procède pas à l’amélioration de ces effets.

Je pense qu’il faut en parler pour le dénoncer, pour informer, pour « exorciser », partager, confronter…et qu’alors, on n’encouragera de moins en moins les actes (votes, vandalisme, profanation…) et les pensées imbéciles et gratuits.

A quelle(s) discriminations avez-vous déjà été confronté (en tant qu'animateur) et comment y avez-vous réagi ?

Il m’est arrivé d’avoir un enfant « différent » : placé en foyer, « léger » intellectuellement, cherchant systématiquement le rôle de bouc émissaire au sein du groupe… Les autres enfants n’étaient vraiment pas tendre avec lui, usant le plus souvent de brimades. Malgré nos efforts pour le protéger et  amener plus de tolérance, pas grand chose ne changeait. Un jour, nous avons appris que cet enfant était victime de sévices sexuels au sein de son foyer. Nous avons enclenché les procédures usuelles et l’affaire a, par la suite, suivit son cours (procès, condamnations…) mais des choses ont filtrées pendant le séjour et il a bien fallu expliquer aux autres enfants ; le bouc émissaire en question étant plutôt favorable au fait de pouvoir enfin s’expliquer et parler. L’équipe d’animation a pu faire un peu de prévention ce qui n’était pas plus mal ; nous avons parlé longtemps en sensibilisant et en dédramatisant à la fois. Finalement, cet électrochoc a permis aux  enfants de comprendre qu’il ne faut pas attendre d’être dans la compassion pour faire des efforts de tolérance.

A quelle(s) discriminations avez-vous déjà été confronté (en tant qu'animateur) et comment y avez-vous réagi ?

Une forme constamment rencontrée lorsque l’on travail avec un public âgé est celle créée par la société, par le biais d’équipements non adaptés aux personnes à mobilité réduite. Ainsi, lorsque l’on souhaite organiser une sortie avec ce public, on se rend vite compte que de nombreux lieux d’accueil leurs sont inaccessibles. Pour contrer cette réalité, on n’a d’autre choix que de sélectionner (discriminer ?) les sites en vérifiant certains critères essentiels : la possibilité de s’arrêter ou de stationner à proximité de l’entrée ; l’accès sans marches ; la présence d’ascenseurs si le lieu présente plusieurs niveaux, la possibilité de s’asseoir très régulièrement pour se reposer, la présence de toilettes adaptées…

Comment réagir (en tant qu'animateur) face à des propos discriminatoires d'enfants ? d'adolescents ? d'adultes ?

Ces types de propos reposent généralement sur une méconnaissance de la différence (physique, mentale, sexuelle, culturelle, religieuse…), et sont souvent basés sur des préjugés négatifs. Pour réagir contre cette forme d’intolérance, l’animateur doit permettre à son public d’accéder à l’information et la culture, pour l’amener à réfléchir et échanger. L’activité peut prendre de multiples formes en fonction de la tranche d’âge concernée : fête à thème, groupe de parole, documentaire vidéo, diapo ou audio, exposition, conférence, grand jeu, débat, partage d’une animation avec « l’Autre »…

 

 

Bibliographie

►     « Racisme, une histoire » George M. Fredrickson, éditions Liana Levi, 2003

Les Etats nations modernes fondés sur le principe de la citoyenneté pour tous et l’égalité des droits ne purent transformer les puissants préjugés en exclusion systématique qu’en considérant les exclus comme n’appartenant pas au genre humain. Et c’est toute l’histoire de ce processus que nous décrit l’auteur : de la montée de l’idéologie raciste à partir du XVIII ème siècle jusqu’à son application pratique au XXème au travers des trois régimes qui s’en sont ouvertement inspiré, interdisant les mariages inter-ehniques, organisant par la loi la ségrégation, l’exclusion du vote, de l’accès à la fonction publique ainsi que des ressources de communautés entières : les Etats du sud des USA tout d’abord, l’Allemagne nazie et l’Afrique du Sud.
 

►     « Penser le racisme. De la responsabilité des scientifiques » Michel Girod, Calmann Levy, 2004

Le racisme constitue l’un des fléaux les plus répandus sur notre planète. De quoi prendre les moyens de réfléchir aux mécanismes qui ont permis son émergence. Les scientifiques sont nombreux aujourd’hui à professer des convictions humanistes et tolérantes. Cela n’a pas toujours été le cas. L’auteur nous décrit ici des dérives qui font froid dans le dos. Il étudie les composantes biologiques, physiologiques, d’apprentissage et d’expériences sociales de la violence chez l’être humain et conclut à la nécessité de toujours museler chez l’homo son côté « demens » et de valoriser sa dimension « sapiens ».

►     « Je suis noir et je n’aime pas le manioc » Gaston Kelman, Mad Max Milo éditeur, 2003

Gaston Kelman aborde la question du racisme sous un angle inhabituel en s’adressant au citoyen moyen qui pense l’autre à partir non de ce qu’il est, mais de ce qu’il devrait être, conformément à l’idée qu’on se fait de ses caractéristiques congénitales. L’auteur dénonce la conviction d’un enracinement dans un état originel dont on ne pourrait se défaire et sur lequel n’influeraient ni la culture, ni le milieu social ni l’éducation. Une tradition africaine veut qu’on soit rattaché à la terre où est enterré son placenta. Aussi ne comprend-il pas  pourquoi un enfant né sur les bords de la Seine ne pourrait s’assimiler et se fondre dans le modèle culturel de son espace de vie, mais qu’il devrait conserver ses racines.

►     « Savoir faire face au racisme » Emmanuel Vaillant, Les Essentiels Junior, 2003

A destination du public enfant à partir de 9 ans, un petit livre illustré reprenant les éléments essentiels sur la question. « Tous différents, tous égaux », c’est l’esprit du texte qui fait une large place à l’histoire récente (régimes d’Apartheid et nazisme) qu’à la période de la colonisation et de l’esclavage. Pour apprendre à vivre ensemble,  dans le simple respect de l’autre, de celui qui est différent de soi, la lutte contre le racisme doit être un réflexe quotidien proclame l’auteur. Un opuscule à laisser traîner entre toutes les mains !