PEUZIAT  Brigitte, Ed. Chronique Sociale, 2019, 108 p.

Les professionnels partant à la retraite sont riches d’une longue expérience qui est rarement transmise. Tel n’est pas le cas de Brigitte Peuziat qui nous offre une ultime et singulière synthèse de sa longue carrière comme assistante sociale au sein d’un service départemental d’Aide sociale à l’enfance. Si le souci didactique d’éclairer le lecteur sur les dispositifs court tout au long de son écrit, ce qui est le plus passionnant reste quand même les vignettes cliniques présentant les situations familiales au cœur de ses interventions.

Contredisant l’idéologie familialiste prétendant que les parents seraient par essence potentiellement compétents, l’auteure n’hésite pas à en dresser des portraits réalistes et lucides, décrivant le narcissisme, la psychose, la perversité et l’alcoolisme de certains d’entre eux. Nulle volonté ici d’une quelconque stigmatisation. Juste la description de ceux qu’elle a rencontrés. Preuve en est, son regret face à l’absence de thérapeutes lors des visites protégées mettant en relation les parents et leur enfant placé. Le travail de (re)tissage des liens qui pourraient s’opérer alors, s’en trouve d’autant plus limité. Car, même si l'auteure a fini par acquérir un savoir-faire, la formation initiale ne l’a jamais préparée à ce travail de médiation. L’absence de soins psychiques reste l’angle mort de ces placements dont les traumatismes ne sont pas suffisamment pris en compte dans l’accompagnement, les Centres médico psychologiques pouvant le faire au moment où ce serait le plus nécessaire étant eux-mêmes submergés.

Loin d’être amère, ce témoignage pointe les progrès accomplis par la protection de l’enfance depuis ses balbutiements, tout en restant lucide et exigeant sur les efforts qui restent à accomplir.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1258 ■ 01/10/2019