L’assistante sociale - Chroniques illustrées

BLENDERS Pinki. Éd. Chronique Sociale, 2024, 143 p.

Elles sont banales et pourtant si insolites, singulières et pourtant si coutumières, désarmantes et pourtant si émouvantes : voilà des chroniques de ce quotidien que tant de professionnel(le)s partagent.

Soutenir des personnes en difficulté passe parfois par contourner leurs réticences et celles de leurs proches. Être assistante sociale, c’est savoir ou du moins tenter de contourner l’obstacle, au besoin en jouant sur ses propres failles, pour mieux faire ressortir les forces d’autrui.

Pourtant, les compétences des usagers sont parfois amoindries. La maladie et l’épuisement, le découragement et l’isolement, la longue litanie des échecs et la peur de l’avenir rendent bien illusoires ces contrats d’engagement réciproques, censés placer hypocritement la relation sur un pied d’égalité.

Equité d’autant plus difficile à atteindre quand les personnes sont si fragilisées. Parce que la fracture numérique les paralyse. Parce que la dématérialisation bloque l’accès aux droits. Parce que les difficultés de déplacement les immobilisent dans les secteurs non desservis par les transports en commun.

C’est à tout cela et à tant d’autres situations encore auxquels les assistantes sociales se confrontent. Pinki Blenders rend visibles et dicibles les savoir-faire et savoir-être déployés pour relever tant de défis. Ce n’est pas un modèle, ni un livre de recettes, encore moins un répertoire de bonnes pratiques. Juste une expérience de terrain, une pratique créative et une mise en application d’une méthodologie, d’une déontologie et d’une application professionnelle.

On y retrouve Henri, farouchement opposé à ce que quiconque franchise la porte de sa maison. Pourtant, sa compagne a vraiment besoin d’être accompagnée pour résoudre ses problèmes sociaux. Mais aussi Monsieur Sainthubert agriculteur à plein temps qui ne survit que grâce au RSA. Eugénie encore, qui à 89 ans a conservé son téléphone à cadran qu’elle ne sait manipuler quand une voix métallique lui demande de taper « 1 » ou « 2 ».

Sans oublier cet usager visité à son domicile qui, de colère, fracasse une chaise en la balançant à travers la pièce. Heureusement, pas en direction de l’assistante sociale ! Ou l’impuissance ressentie face à Tiego, bel et bien propriétaire du véhicule nécessaire pour honorer le contrat de travail qui lui a été proposé. Mais, pas de chance, sa voiture est en panne et a peu de chance d’obtenir une homologation du contrôle technique.

Pourtant, il y a aussi toutes ces petites réussites vécues comme autant de grandes victoires contre l’injustice. Cette intervention sollicitée par un homme résidant à l’autre bout du pays pour aider sa mère, elle toute proche, à se rétracter d’un achat inconsidéré. Ou la demande insolite de Madame Desvilles, pour retrouver l’enfant qu’elle avait dû abandonner, cinquante ans auparavant. Et finalement, cette aide financière accordée pour payer une facture d’électricité, l’argent qui lui était destiné ayant été investi dans un noël, exception après des mois de restriction.

Autant de frustrations que de satisfactions pour une profession confrontée à une iniquité qu’elle tente tant bien que mal de combattre, comme elle le peut. Face au découragement : l’engagement. Face aux exigences technocratiques : la résistance. Face à la perte de sens : des valeurs à préserver et à défendre. Pinki Blenders nous propose cinquante chroniques mêlant émotion, réflexion et humour, à ne pas rater.