L’éducateur et son autre histoire ou mort d'un pédagogue

Jean-François GOMEZ, Editions des deux continents, 1994, 200 p.

Un ouvrage des plus curieux. On a là mille chances de se perdre dans le labyrinthe des souvenirs assez obscurs et banals d'un éducateur devenu universitaire et directeur d'un établissement médico-social à Montpellier. Présenté en 4ème de couverture comme l'un des récits de vie les plus parfaits et les plus complets (sic !), on n'arrive toutefois pas, tout au long des 200 pages, à émerger d'un océan de perplexité.

Quatre ressorts constituent le corps du livre. Il v a d'abord des racines familiales que l'auteur tente de se réapproprier au travers d'une foultitude de souvenirs très éparpillés et anecdotiques que rien ne relie vraiment : on passe d'un frère mort à 23 ans, à des réminiscences de scoutisme en passant par l'image de la première tentative de "fugue'', la figure marquante d'un père artisan-menuisier ou les feux de la St-Jean...

Il y a ensuite les différentes étapes marquantes d'une carrière éducative : le pouvoir mesquin des éducateurs titulaires sur le petit stagiaire, l'abandon lors d'un transfert d'orphelins dans une maison ravagée par les puces et la prise de conscience du fantasme de toute-puissance que recèle tout acte éducatif.

Il y a encore la charge contre la pédagogie stigmatisée comme désir d'étouffement de l'enfant, comme occasion pour l'adulte d'assouvir sa perversion, son sadisme et sa bêtise... horreurs qui prennent des proportions d'autant plus néfastes qu'elles sont amplifiées dans des institutions figées et rigides.

Enfin, comme un leitmotiv, revient régulièrement tout au long du livre, cette expérience d'hospitalisation de l'auteur qui semble avoir été fondatrice de sa volonté de recherche sur lui-même.

Paru initialement en 1981, réédité en septembre de cette année, cet ouvrage répond certainement à la reconnaissance d'un intérêt majeur auquel j'avoue n'être guère sensible.

J’ai refermé le livre sans avoir trouve le mode d'emploi, preuve peut-être de mon manque de perspicacité ou de mon inculture... Aussi, lançai-je un appel pressant : cherche désespérément décrypteur (écrire au journal !).

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°283 ■ 24/11/1994