Internats et séparations, des outils éducatifs?

Richard JOSEFSBERG, érès, 1997, 152 p.

L’internat a eu son heure de gloire : le placement était alors conçu comme l’éloignement du milieu pathologique et était doté de toutes les vertus. Puis est venue la période de disqualification : la plus mauvaise des familles vaudrait mille fois mieux que la meilleure des séparations. Aujourd’hui, on en revient à une perception plus raisonnable. Aussi, le travail que nous propose Richard Josefsberg est-il le bienvenu. Pourtant, les 100 premières pages quoiqu’érudites et fort bien documentées ne nous permettent pas vraiment d’entrer dans le vif du sujet. Approche théorique de la notion de séparation, approche historique de sa pratique et descriptions de quelques vignettes cliniques nous amènent au dernier tiers de l’ouvrage qui répond le mieux à la préoccupation du terrain.

La séparation explique l’auteur n’est pas suffisante en soi pour permettre de sortir l'enfant de sa problématique : “ au début du placement, les enfants, souvent, ne reproduisent que ce qu’ils ont vécu : c’est un moment de répétition ” (p.108). Trois conditions apparaissent nécessaires pour favoriser l’ouverture et de nouvelles relations.

C’est d’abord l’existence d’un cadre institutionnel qui propose la garantie de la continuité, de l’étayage et de l’élaboration du processus. Là, vont jouer des facteurs essentiels que sont la permanence des rythmes réguliers, les cérémonials de groupe, la lisibilité du quotidien.

Second facteur fondamental, c’est la triangulation permettant de donner du sens à l’événement. L’auteur insiste à ce propos sur la stabilité du personnel. Un adulte crédible et sécurisant peut aider grandement un enfant à se réapproprier son histoire et à construire son avenir.

Enfin, il semble tout aussi important de favoriser le temps nécessaire pour que l’enfant puisse cheminer. “ C’est par un savoir sur soi que l’enfant pourra se dégager de certains modes de fonctionnement ” (p.127) Le travail de réflexion individuelle produit par les différents professionnels à son contact va être à ce niveau essentiel.

Mais, la réussite de la séparation tient aussi à bien d’autres facteurs que sont la commande sociale, la rivalité entre services, l’équilibre de l’institution, l’articulation avec les familles qui peuvent être coopérantes ou résistantes. Entre la fusion-totalité et la rupture-chaos se trouve la mission de l’internat rééducatif : cadrature du cercle ou défi trop souvent relevé et réussi et si peu valorisé ?                                                                  

 

Jacques Trémintin - LIEN SOCIAL ■ n°441 ■ 07/05/1998