Je suis né … à 17 ans

BECCARO Thierry, Éd. Mon Poche, 2019, 304 p.

La biographie de l’un des animateurs les plus populaires du petit écran ? Le lecteur pourrait bien se méfier de ce genre de littérature people. Il aurait tort. Car, sous les projecteurs éclairant l’homme de radio et de télévision, de cinéma et de théâtre, se cache une face bien plus sombre : celle d’un petit garçon apeuré, recroquevillé sur lui-même pour se protéger de la violence de son père. Son exposition médiatique, Thierry Beccaro a voulu justement l’utiliser, pour attirer l’attention sur la maltraitance infantile. Toute sa vie, tant personnelle que professionnelle, a été marquée par ce terrible vécu. Ces crises de spasmophilie et de tétanie pouvant surgissant subitement, ce doute qui le dévore en permanence sur ses compétences et sa légitimité et cette angoisse viscérale qui le vrille par manque de confiance en lui sont autant de plaies non cicatrisées prêtes à s’ouvrir à tout instant. Comme tant d’enfants victimes, il développa une immense culpabilité, cherchant à expier cette responsabilité qui justifiait à ses yeux les mauvais traitements reçus. De ce père qui, sous l’effet de l’alcool et au moindre prétexte, déclenchait contre son fils et sa mère une avalanche de coups, il n’a jamais voulu parler comme d’un homme violent, préférant évoquer la violence qui l’habitait. Aujourd’hui encore, il a du mal à encenser une personne, même s’il admire son parcours, ayant toujours un doute sur ce qui peut se cacher derrière l’apparence. S’il n’a jamais réussi à se débarrasser de valises si lourdes à porter, il a tenté de vivre avec. Il a suivi thérapie sur thérapie, pour y arriver. L’une d’entre lui a même proposé, toute honte bue, de dire merci à ses parents, sans lesquels il n’aurait pas eu le destin qui l’attendait ! Quelles que soit les insanités qu’il a entendues, Thierry Beccaro a réussi à reconnaître que son bourreau avait pu aussi être un homme formidable, même si son enfant intérieur n’a jamais oublié, ni pardonné. Tétanisé à l’idée de devenir père et de reproduire ce qu’il avait vécu, il devint celui qu’il aurait tant voulu avoir. Ni le succès, ni la notoriété qu’il a obtenus dans sa vie professionnelle n’ont remplacé cette affection et cet amour qu’il n’a pas reçus. Mais, il a pourtant réussi à en nourrir son entourage. En rompant avec le silence qui enveloppa toujours son enfance maltraitée, il réussit à apporter sa pierre au combat contre les violences faites aux enfants.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1275 ■ 09/06/2020