Introduction au travail social. Méthodologie et pratiques nord-américaines
Sous la direction d’Yves HURTUBISE, Chronique Sociale, 2004, 256 p.
Nous sommes tellement occupés dans l’hexagone à sauvegarder la spécificité de nos professions respectives, provoquant ainsi leur éclatement et leur morcellement, que nous en arrivons à ignorer la forme prise par le travail social dans les autres pays. Cet ouvrage permet de constater ce qui nous unit et ce qui nous distingue de nos collègues d’Amérique du Nord. Les professionnels se trouvent, là comme ici, confrontés à une double préoccupation : satisfaire aux exigences du service employeur et servir les besoins de l’usager. Les axes méthodologiques principaux mis en œuvre Outre-atlantique, peuvent se résumer en trois constantes. L’intervention sociale s’adresse aux personnes, groupes et collectivités qui, dans leurs conditions de vie ou leur rapports aux autres, rencontrent des situations d’oppression, de discrimination et de désorganisation. Ensuite, elle essaie de comprendre leur problématique en la replaçant dans leur contexte social. Enfin, elle se concrétise sous de multiples formes, les pratiques diversifiées faisant apparaître ces métiers comme une profession aux nombreux visages. Et c’est vrai que tout comme en Europe, les professionnels s’appuient sur une somme considérable de connaissances et d’habiletés. Même si les années 1980 ont été l’occasion de l’élaboration d’une approche généraliste fusionnant ces trois approches, on distingue néanmoins assez nettement les techniques d’intervention individualisée, de groupe et communautaire. L’intervention individualisée consiste à accompagner une personne dans ses souffrances afin qu’elle puisse leur donner du sens et trouver les ressources nécessaires pour participer en tant qu’actrice à son devenir et à celui de sa communauté. Jusque là, rien de bien nouveau. Le travail de groupe, embryonnaire dans notre pays, semble bien plus implanté là-bas. Il cherche à mettre en œuvre le soutien par les pairs, s’appuyer sur le besoin d’appartenance, à essayer de s’attaquer à la solitude et à l’isolement, à favoriser la comparaison des problématiques voisines et à renforcer l’individu en le faisant soutenir par ses pairs. Pour mener ce type d’intervention, il faut favoriser la cohésion et penser en terme de groupe et surtout descendre du piédestal du spécialiste. Troisième forme, l’action communautaire qui part du principe que, puisque les problèmes sociaux sont d’origine collective, les solutions ne peuvent aussi que l’être. Il faut donc redonner du pouvoir à la communauté de base : c’est le principe de l’empowerment. Le défi de transférer du pouvoir aux personnes vivant en situation de crise ou de difficultés ne peut être relevé que si le travailleur social les voit effectivement sous l’angle de la compétence. C’est pourquoi son rôle évolue entre le militant, le partisan, le négociateur et l’avocat. C’est peut-être dans ces postures peu que l’on trouve le plus de différences avec nos habitudes hexagonales.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°748 ■ 07/04/2005