L’alphabet du social
LADSOUS Jacques, érès, 2012, 144 p.
Nous l’avons tous constaté : qu’il est difficile d’expliquer notre profession aux néophytes qui nous entourent. C’est justement le pari que s’est lancé Jacques Ladsous : tenter d’expliciter son intervention à son voisin, lui qui n’a jamais côtoyé de près ou de loin l’action sociale. Il emprunte pour cela le support de l’abécédaire, égrenant les mots signifiants de l’action de l’éducateur. En tout bien, tout honneur, c’est le A qui commence, comme amour. Notion taboue chez les travailleurs sociaux qui se sont longtemps fixés, comme horizon, l’idéal de la technicité. Et pourtant, constate l’auteur, la création d’une relation avec l’usager est impossible si l’on ne commence pas par lui signifier qu’il ne nous est pas indifférent. Mieux encore : son adhésion à l’action engagée ne pourra guère s’élaborer s’il ne sent pas qu’on l’aime. Parce que l’autre n’est pas fondamentalement différent de nous, s’instaure ainsi une F. comme fraternité, qui ne donne ni dans une condescendance relevant de l’approche charitable, ni dans une fusion qui l’assimilerait à soi. La démarche vers l’autre se nourrit, au contraire, de C. comme compréhension (afin de déjouer les apparences), tout autant que de D. comme doute (pour ne rien rigidifier et préserver la souplesse). L’accompagnement qui se tisse alors, s’appuie sur un triple outil : I. comme initiative et inventivité (qui procurent les marges de manœuvre nécessaires), R. comme regard (qui peut transmettre tant notre bienveillance que nos angoisses destructrices) et T. comme temps (qui permet de déployer patience et persévérance). Au final, cela fait ce M., comme militantisme, qui désigne l’engagement auprès des faibles et de ceux qui gênent. Ces notions ainsi énumérées, qui parleront aux initiés, trouvent leur illustration concrète dans des vignettes cliniques écrites par des acteurs de terrain auxquels Jacques Ladsous ouvre les pages de son livre.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1095 ■ 28/02/2013