A Pythagore
BALNY Emmanuel, édition Appendices, 2009
« Des centres urbains en périphérie. Des dernières rues du Monopoly à la terre des pauvres. De belles tours aux cages vides, des escaliers noirs aux paliers nus. Nous avons tout parcouru et avant de partir nous avons brisé ce qui restait », c’est sur ce récit intriguant que commence le petit recueil de sept nouvelles écrites par Emmanuel Balny. L’auteur n’est pas écrivain de métier. Il exerce comme éducateur spécialisé dans une maison d’enfants à caractère social situé sur les hauteurs de Nice. Il écrit à ses moments perdus. Inspiré par une ZUP où il n’a pourtant jamais vécu, ses histoires courtes nous plongent au coeur de la ville. Paysages et personnages s’entrecroisent. Pourquoi cette grande tour HLM est-elle vidée de tous ses locataires ? Qu’est-ce qui fascine tant cette classe de CM1 quand, en sortie scolaire, ses élèves passent médusés devant l’immeuble où habite la mère à Karim ? Que révèle ce sac éclaté étalant ses vêtements sur le tapis roulant de l’aéroport ? Et Doudou le clochard qui payait des coups à tout le monde avec son RMI qu’il touchait chaque six du mois, qu’est-il devenu ? Inutile d’insister, le lecteur ne le saura qu’en lisant « A Pythagore », premier opuscule d’une nouvelle collection des éditions Appendices intitulée Littérature urbaine. L’ambition de ce petit éditeur ? Mettre au cœur de ses publications les repères, les codes, les cadences et les métissages du monde urbain. Se réapproprier la ville par la littérature, mais tout autant la littérature par la ville. Placer la rue dans les livres et les livres dans la rue. Permettre aux lecteurs de s’appartenir dans un univers si souvent dépossédé par les stratégies marchandes, de contrôle et d’uniformisation. Noble perspective que nous ne pouvons qu’encourager ses initiateurs à poursuivre.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°929 ■ 14/05/2009