La délinquance des mineurs, l’enfant, le psychologue, le droit

Catherine BLATIER, Presse Universitaire de Grenoble, 1999, 292 p.

A une délinquance commençant de plus en plus tôt et produisant des actes de plus en plus graves a répondu une inquiétude de plus en plus grande de la population. D’où l’intérêt de cette étude  tout à fait passionnante sur la délinquance des mineurs, son identification et son traitement tant judiciaire, éducatif que psychologique. L’auteur y décrit longuement le dispositif de la justice des enfants en la replaçant dans un contexte historique et s’appuie sur toute une série d’études universitaires qui démontrent la pertinence de la réponse éducative. L’option carcérale y est évaluée pour l’échec de ses ambitions salvatrices. Ainsi de ces 507 mineurs incarcérés dont 77% sont à nouveau condamnés (1991). Ou encore ces 1147 dossiers dont la destinée a été observée 5 ans après, avec 50% de récidive pour vol et 19% pour atteinte volontaire contre les personnes (1997). Les explications du passage à l’acte sont nombreuses qui font une large place à la tentative de définition de la personnalité criminelle. Au XIXème siècle, Pinatel repérait déjà un noyau constitué par l’agressivité, l’égocentrisme, la labilité et l’indifférence affective, chacun de ces traits devenant d’autant plus problématique qu’il se combine aux autres. Le Blanc s’est, quant à lui, penché sur l’itinéraire qui favorise une structuration du sujet dans une carrière criminelle : la délinquance de sporadique, devenant explosive, puis persistante mineure pour terminer en persistante grave. Eysenck, de son côté,  situe le délinquant au cœur de l’interaction de quatre aspects de sa personnalité : cognitif (intelligence), conatif (caractère), affectif (tempérament) et somatique (constitution physique). Les psychiatres évoquent les personnalités psychopathiques (recours répétés aux passages à l’acte comme réponse à la décharge de tension), antisociale (mépris et transgression des droits d’autrui) ou encore les états limites (faiblesse du Moi, manque de contrôle pulsionnel). Les facteurs favorisant l’émergence et la consolidation de ces dysfonctionnements ne doivent pas être recherchés du côté de la dissociation familiale mais plutôt de son fonctionnement conflictuel ou de l’absence de son rôle structurant. Une hiérarchisation des différents facteurs a pu être tentée par Biron (1981) qui classe dans l’ordre : la fréquentation de pairs délinquants, la réaction sociale négative (qui renforce la faible estime de soi), les difficultés scolaires, la mauvaise occupation des loisirs, le manque d’encadrement familial et les conséquences de la pauvreté. Face à ce tableau inquiétant, la pratique punitive classique apparaît de peu d’effets, ce qui semble le plus efficace relevant d’un développement des compétences parentales dès la naissance de l’enfant et la valorisation des compétences sociales de ce dernier lui permettant ainsi de construire une estime et une image de soi positive.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°537 ■ 29/06/2000