Vies majuscules. Autoportrait de la France des périphéries

Vaillant Emmanuel, Zambeaux Édouard, Éd. Les petits matins, 2020, 335 p.

On parle volontiers sur eux. Mais, quand leur donne-ton la parole ? Voilà qui est fait, grâce aux deux journalistes, animateurs des ateliers d’écriture ouverts aux invisibles. Ils sont quatre cents à avoir accepté de livrer ainsi des bribes de leur quotidien. Le projet n’était pas de susciter des opinions ou des analyses, mais de faire émerger des morceaux de vie. Chacun avait quelque chose à dire. Il fallait juste le convaincre de le faire. Quatorze semaines d’immersion à faire du saute-frontière entre les régions auront permis de libérer la parole et sa traduction en court récit. Une semaine à dix jours, furent nécessaires à chaque étape, pour faire tomber les aprioris et susciter la confiance. Sur tous les témoignages recueillis, cent soixante récits de ces existences modestes et précieuses sont présentés ici. Le résultat de cette plongée dans cette France qui survit plus qu’elle ne vit, c’est Dana qui vit depuis douze ans dans les squats. Loïc qui, une fois toutes les factures payées, ne dispose plus que de 250 € pour manger. Éric qui explique avoir oublié de faire les courses, quand son petit-fils remarque ses placards vides. Alice qui bénéficie d’une maigre retraite, après s’être arrêtée de travailler neuf ans pour élever ses enfants. Tous ces petites gens si souvent inaudibles qui s’expriment ici avec tant de dignité et d’élégance.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1289 ■ 16/02/2021