Une brève histoire de l’égalité

PIKETTY Thomas, Éd. du Seuil, 2021, 357 p.

La marche vers l’égalité a commencé il y a longtemps déjà et n’est pas prête à se terminer. Ses avancées alternent avec des retours en arrière et des replis identitaires. Son moteur, ce sont les luttes sociales, les révoltes et les révolutions. Son carburant, le suffrage universel et la démocratie parlementaire, l’éducation gratuite et obligatoire, l’assurance maladie universelle et l’impôt progressif, le droit syndical et la liberté de la presse. Même si bien des progrès restent à accomplir, les résultats sont là au niveau mondial : espérance de vie passant de 26 ans en 1820 à 72 ans en 2020 ; mortalité infantile se réduisant de 20 % en 1900 à 1 %  aujourd’hui ; alphabétisation des plus de 15 ans diminuant de 10 à 85 % en un peu plus d’un siècle… Pour autant, les inégalités non seulement n’ont pas disparu, mais tendent à augmenter : si, dans le monde, les 1% des plus aisés possédaient 55 % des richesses en 1914 et 65 % en 1939, puis 20 % en 1980 avant de remonter à 25 %, alors que 50 % des plus pauvres n’en disposent que de moins de 5 %. Thomas Piketty rappelle que l’imposition du taux marginal supérieur à parfois près de 80 ou 90 % entre 1945 et 1980 n’a jamais empêché ni la croissance, ni la hausse de productivité particulièrement forte à cette période. Elle a surtout permis de financer les dépenses sociales. A la différence de la dérégulation économique, financière et fiscale qui aggrave les inégalités depuis 1980. Les faire à nouveau reculer requière plusieurs mesures : renforcement de l’État social, impôt progressif et confiscatoire pour les très hauts revenus, régulation de l’échelle des salaires qui va actuellement de 1 à 100, réforme redistributive de l’héritage… des mesures s’inscrivant en opposition de toutes les politiques gouvernementales successives depuis quarante ans.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1328 ■ 29/11/2022