L’état des inégalités en France 2007

Observatoire des inégalités, Belin, 2006, 253 p.

On en parle souvent, on les constate quotidiennement, on propose de les combattre… il en manquait juste une vision synthétique : c’est ce que nous propose cet ouvrage. Certes, « les Français vivent mieux qu’il y a cinquante ans. Le développement de la société de consommation a conduit à une homogénéisation partielle des modes de vie » (p.51). Il n’empêche que l’écart entre les 10% les plus pauvres et les 10% les plus riches va de 1 à 4, les 10% les plus fortunés détenant 46% de la richesse du pays. Mais, les inégalités ne concernent pas que les revenus. On les retrouve aussi dans les pratiques et consommations culturelles qui apparaissent étroitement liées à la trajectoire sociale des individus : 49,4% des ouvriers partent en vacances contre 88,2% des cadres. Le confort des habitations a beaucoup progressé depuis trente ans. Si 61% des logements possédaient une salle d’eau, des toilettes et le chauffage en 1973, ils sont 97,4 % à en bénéficier en 2002. Pour autant, cinq millions de personnes continuent à vivre dans des logements dangereux et insalubres. Le fait d’avoir un emploi ne garantit pas de bénéficier d’un domicile et le fait de disposer d’un toit n’exclut pas de se trouver en grande difficulté sociale et économique : 15% seulement des résidences construites en 2005 ont des niveaux de loyers accessible aux ressources des deux tiers des ménages de France. Tous les indices de santé sont les plus mauvais pour les catégories sociales les plus défavorisées : on trouve dix fois plus d’obésité dans les familles ouvrières (7,4%) que dans les familles de cadre (0,7%). Cette situation risque de bien peu évoluer avec le temps, la pauvreté se reproduisant de génération en génération. Si l’on trouve un tiers d’enfants d’ouvriers en sixième, ils ne sont plus  que 6% dans les classes préparatoires des grandes écoles. Les enfants des cadres supérieurs y sont 54% (alors qu’ils ne représentent que 15% des élèves de 6ème). L’enseignement adapté par contre réunit 44% d’enfants d’ouvriers (contre 1,6% d’enfants de cadres). Ce ne sont pas les députés qui vont changer la donne, eux qui sont seulement 5,5% à être enfant d’ouvrier ou d’employés (qui constituent pourtant la moitié de la population active). Cette sous représentation concerne aussi l’autre inégalité flagrante qui n’est pas sociale, mais de genre : une seule présidente de région (sur 22), trois ayant réussi à prendre la tête d’un des 100 départements existant. Le monde de l’entreprise ne vaut guère mieux : alors que 80,7% de leurs employés administratif sont des femmes, elles occupent seulement 14,5% des postes de PDG. Plus de 80% des emplois non qualifiés et à temps partiel sont là aussi occupés par des femmes. Pas de doute, les inégalités qu’on espérait voir régresser avec le temps, sont en train de s’enkyster : les hauts revenus croissent, mais la redistribution des ressources stagne.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°864 ■ 06/12/2007