Accompagner les personnes handicapées - Réflexions autour des apports d’un groupe d’étude du CTNERHI

Elizabeth ZUCMAN,  CTNERHI (236 bis rue de Tolbiac 75013 Paris), 1998, 227 p.

Il est loin le temps où les enfants atteints de lésions cérébrales graves étaient remisés dans les services de défectologie des hôpitaux psychiatriques, car considérés comme incurables. Eh bien non, elle n’est pas si lointaine cette époque, puisqu’elle remonte seulement à la fin des années 50. En 1968, ce qu’on a appelé successivement les encéphalopathes, puis les arriérés profonds acquièrent le statut de polyhandicapés qu’une définition du CTNERHI remaniée en 1992 désigne comme les personnes atteintes d’ « association de déficiences graves avec retard moyen, sévère ou profond (QI < 50) entraînant une dépendance importante à l’égard  d’une aide humaine et technique permanente, proche et individualisée. » Il n’existe pas de données épidémiologiques fiables sur cette population. On estime néanmoins, sa prévalence à 2,14 pour mille pour les moins de 19 ans, à 2,48 pour mille entre 19 et 59 ans et à 8,5 pour mille à 60 ans et plus.  Le taux de surmortalité est de 2% par année d’âge. De nombreuses complications médicales sont liées aux difficultés de communication (et donc de plainte quand il y a douleur) : dyshydratation (souffrance silencieuse de la soif), envahissements bronchiques suite aux fausses routes successives, détériorations dentaires, rétractation musculo-tendineuse. On ne peut que constater le manque dramatique d’établissements d’accueil liés pour l’essentiel à l’image négative que cette prise en charge garde dans l’opinion publique et surtout son coût élevé: une place pour 2,5 enfants en moyenne et une place pour 6 à 7 adultes. Il s’ensuit un maintien dans le milieu familial deux fois plus important qu’en institution. L’étude du CTNERHI s’intéresse aux différents aspects du polyhandicap. Avec tout d’abord les importants progrès réalisés en matière éducative, les équipes ayant appris à adapter leur savoir-faire aux besoins particuliers de ces populations. L’accent est mis sur l’accès à une éducation cognitive, mais aussi sur la socialisation : apprendre à demander son tour, apprendre à refuser, à remercier, à partager. Chaque usager développe ses propres moyens de communication verbale et non-verbale qu’il faut essayer de décoder, l’important étant de toujours s’adresser à eux : « leur dire en mots simples ce que l’on, fait, ce qu’on va faire avec eux et solliciter toujours leur réaction d’approbation ou de refus » (p.38). Autre aspect fondamental : le respect des différents âges de la vie de la personne. On n’agira pas de la même façon avec un enfant, un adolescent et un adulte, une attention particulière devant être accordée à la vie affective et sexuelle de ce dernier. Le risque essentiel qui menace les personnes polyhandicapées, c’est bien la routinisation, la chosification et le découragement auxquels correspond pour le professionnel la tendance dépressive liée au caractère anxiogène du travail se traduisant par des paroles ou gestes violents.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°518 ■ 10/02/2000