Éloge du voyage à l'usage des autistes et de ceux qui ne le sont pas assez
SCHOVANEC Josef, Ed. Plon, 2014, 229 p.
On savait l'auteur « à l'est », comme il nous l'avait décrit dans son premier ouvrage. Le voilà cette fois-ci tout autant à l'ouest, au sud qu'au nord, lancé à la découverte du vaste monde. C'est que Josef Schovanec, savant et autiste, a troqué son costume de sédentaire déprimé, contre celui de nomade heureux. Durant ses années de lycée, la ligne 8 du métro était pour lui une aventure. Et le voilà sillonnant les continents, parcourant les villes, se lançant dans une étude comparée des zones internationales d'aéroports, des hôtels et des civilisations urbaines, présentant ses expérimentations des métros utilisés, des paysages survolés par avion ou du sens de l’hospitalité des ethnies visitées : au-delà des kilomètres parcourus et des paysages découverts, ce sont les peuples et les cultures qui sont l'objet de son attention première. Ce qui le guide et l'attire, c'est bien l'apprentissage de l'autre et les décalages entre les milles façons de vivre rencontrées. Avec, en premier lieu, la diversité du rapport à la différence, selon les contrées. Il est des pays où la grandeur physique, l'embonpoint ou la timidité loin de vous stigmatiser vous feront être, au contraire, considéré. Les conventions que, trop souvent et bien à tort, on croit universellement partagées ne sont, en fait, que des contentions nous enfermant dans la prison d'une normalité abusive. Parce que leur réussite n'est pas proportionnelle à l'argent dépensé et parce qu'ils impliquent le renoncement et l'effort personnel, les voyages constituent une thérapie aux effets comparables à bien des médications. Quel meilleur moyen de lutter contre les préjugés, de relativiser le sentiment d'insécurité et de rappeler la pusillanimité de ces frontières divisant les Hommes ? Voilà un remarquable éloge de la rencontre, de la fraternité et de la tolérance, à déguster sans modération.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1145 ■ 10/07/2014