Tourisme et handicap. Le tourisme adapté ou les loisirs touristiques des personnes déficientes
REICHHART Frédéric, Ed. Chiron, 2011, 286 p.
L’histoire de l’émancipation des personnes avec handicap est aussi l’histoire de leur conquête des différents espaces, bien au-delà de la simple habitation ou du lieu de travail. Frédéric Reichhart nous propose ici une exploration de leur droit au tourisme tout à fait passionnante. On revient de loin, quand on se rappelle qu’en 1980, le tribunal de Francfort accordait une indemnisation à un touriste allemand, pour le préjudice qu’avait représenté la présence d’un groupe de personnes avec handicap sur son lieu de villégiature ! Pourtant, dès la fin du 19ème siècle se développent des séjours sanitaires et hygiénistes. Bien sûr, les sanatoriums pour les tuberculeux n’ont jamais eu pour vocation à être un espace de loisirs, mais les premières animations occupationnelles visant à lutter contre la monotonie et l’ennui ouvrent la voie. La volonté d’offrir aux personnes avec handicap des vacances vont se concrétiser sur deux registres : les séjours spécialisés et sectoriels regroupant les personnes ayant les mêmes déficiences et les séjours inclusifs et intégrés mêlant personnes avec handicap et valides. Dans la première approche, on trouve les transferts des établissements qui louent un gîte ou un centre pour leur groupe de résidents. Autre illustration, l’APAJH qui propose un service de séjours adaptés organisant des vacances pour les familles avec leur enfant porteur de handicap. Sans oublier l’APF qui propose des séjours encadrés par des bénévoles au pair, nourris logés et transportés qui « de l’aube au milieu de la nuit, sont les bras et les jambes de nos vacanciers, pour tous les actes essentiels de la vie ». L’autre stratégie, c’est la fréquentation de lieux de vacances ordinaires. Ainsi l’UNAPEI a-t-elle fait le choix de labelliser des centres offrant des conditions adéquates d’accessibilité. Mais, il y a aussi l’insertion progressive des enfants et des adolescents souffrant de déficience dans les accueils collectifs pour mineurs. Il faudra attendre 1975 pour que soit abrogée la circulaire les réservant exclusivement aux bien portants. Les grandes fédérations d’éducation populaire se sont engagées depuis lors, à favoriser et encourager cette insertion qui peine néanmoins à se concrétiser. Car, les personnes avec handicap se heurtent au sous-équipement de notre pays pour ce qui est de leur accueil de vacance. Malgré un marché européen, pourtant prometteur, évalué à trente sept millions de personnes (cinquante si l’on compte les accompagnateurs), 0,64 % seulement des deux cent trente et un mille établissements de tourisme français ont fait l’effort de se rendre accessibles, considérant cette démarche trop contraignante et peu rentable. La promotion du tourisme adapté a encore du travail devant lui !
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1113 ■ 11/07/2013