Conflit : mettre hors-jeu la violence

B. BAYADA, Guy BOUBAULT, Anne-Catherine BISOT, G. GAGNAIRE, Chronique Sociale, 2000, 147 p.

Cette troisième édition d’un ouvrage réalisé par quatre membres de l’association « Non violence actualité » mérite le détour, surtout dans une période qui ne brille guère par les capacités du genre humain à régler ses conflits autrement que par la guerre, la répression ou l’agression. Cette situation n’est pas un hasard : notre époque est largement dominée par la discrimination et l’exclusion, la compétition l’emportant bien trop souvent sur les attitudes de solidarité. La réponse citoyenne ne réside ni dans la violence ni dans le repli sur soi, expliquent les auteurs, mais bien dans l’apprentissage de la maîtrise de cette violence et dans l’initiation à une approche constructive du conflit. Pour y arriver, deux notions doivent être précisées.

Contrairement à l’idée reçue qui le charge d’une lourde connotation négative, le conflit est inhérent à la relation humaine. C’est un temps de confrontation incontournable autour des besoins, des valeurs et des intérêts de chacun. Ce qui est en cause c’est plutôt l’alternative qui ne propose d’en sortir que dans la position de gagnant ou de perdant. Seconde confusion, toute aussi fréquente, celle qui identifie agressivité et violence. L’agressivité peut être positive : elle permet à chacun de s’affirmer et de se structurer. Il faut encourager chacun à utiliser ce potentiel à des fins constructives. La violence, elle, intervient comme une forme de dégénérescence de l’agressivité et d’échec de la communication. Elle annule la différence et fait passer l’autre de sujet à l’état d’objet. L’approche non-violente du conflit favorise le recentrage sur l’objet de l’antagonisme (et non plus sur la rivalité de personne qui en découle) et sa médiatisation (en évitant une dualité destructrice). Plusieurs méthodes sont possibles : l’arbitrage (un tiers tranche en désignant qui a raison, qui a tort), la conciliation (recherche d’une solution de compromis), la médiation (renouer les fils de dialogue pour permettre aux interlocuteurs de trouver une solution qui respecte les intérêts de chacun). Dans tous les cas il s’agit de trouver un temps pour parler, d’exprimer clairement l’objet du conflit, de résumer les problèmes en identifiant clairement leurs causes et d’explorer les solutions possibles. Cela passe par la gestion de ses émotions : écouter et maîtriser sa peur, sa colère, son stress. La gestion des conflits demande assurément de l’énergie, du temps et de l’imagination. Elle nécessite, en outre, que chacun exprime son point de vue sans dénier celui des autres et entre dans une écoute active avec la volonté réelle de comprendre. Apprendre à ne pas être centré sur soi et accepter de s’enrichir de l’apport de l’autre ne va pas de soi. Cela nécessite une éducation qui doit être entretenue en permanence. C’est la voie qui permettra non de réduire les conflits, mais d’aider à les résoudre d’une façon positive.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°598 ■ 22/11/2001