Passage à l’acte, traumatisme, résilience et effets transgénérationnels
RODET Chantal (sous la direction), Ed. Chronique Sociale, 2014, 126 p.
De cet ensemble de contributions inspiré par une psychanalyse parfois un peu trop redondante et verbeuse, on retiendra surtout l’apport particulièrement brillant et éclairant des criminologues Valérie Moulin et Marc Dupuis, ainsi que l’exposé tout aussi lumineux de Serge Tisseron, les uns et les autres ouvrant et refermant la boucle, en partant de l’agression et arrivant au processus de résilience. Les premiers explicitent donc, avec succès, les explications multiples des passages à l’acte délinquant. Refusant, pour leur part, la logique causale et déterministe qui se focalise sur les seules dimensions biologiques, psychiques, sociales ou historiques, ils démontrent la diversité et la polysémie des processus à l’œuvre et insistent sur la nécessité d’entrer dans une démarche compréhensive et pas seulement explicative. Et de préciser les différents axes à distinguer dans le discernement à faire émerger : la position subjective de l’auteur de l’infraction tout autant que celle de l’observateur ou de l’enquêteur, la dynamique processuelle qui a conduit et accompagné la transgression et le contexte global dans lequel elle a été commise. Serge Tisseron, de son côté, se focalise non sur les modalités à partir desquelles le traumatisme a été commis, mais sur les conditions dans lesquelles non seulement il a été vécu par la victime, mais aussi comment elle peut en guérir. Les blessures psychiques mal cicatrisées suintent soit sous la forme de symptômes surgissant, malgré les mécanismes de refoulement, soit sous la forme de reviviscences liées au processus de clivage. La thérapie consiste à permettre à la personne blessée de réussir à symboliser ce qu’elle a vécu, afin de mieux s’en détacher. C’est bien une empathie réciproque et mutuelle qui peut le permettre le mieux : accepter que l’autre me révèle à moi-même.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1158 ■ 05/03/2015