Au cœur des émotions de l’enfant - Comprendre son langage ses rires et ses pleurs

Isabelle FILLIOZAT, éditions Jean-Claude Lattès, 1999, 321p.

Nourrir le quotient intellectuel des enfants n’est pas suffisant. Il faut aussi leur apprendre à identifier, nommer, comprendre, exprimer et utiliser positivement leurs émotions, sous peine de les voir en devenir les esclaves. Pour accroître leur quotient émotionnel, il faut que les adultes écoutent les enfants, leur donnent la permission de libérer leurs tensions et leur offrent  un espace pour décharger leurs émotions. C’est sur cette intelligence de cœur qui nécessite une juste maîtrise des peurs, des colères et des tristesses du quotidien que nous propose de réfléchir le livre d’Isabelle Filliozat. Le seul conseil qu’elle revendique de donner, c’est de renoncer aux avis péremptoires et aux définitions abruptes et de leur préférer le dialogue permanent. Quelles sont les questions que nous devons nous poser pour favoriser cet épanouissement émotionnel ? D’abord, s’interroger sur ce qu’est le vécu de l’enfant : celui-ci est facilement envahi par ses affects, il reste prisonnier de l’immédiateté de ses réponses, sans médiation de la pensée pour relativiser les choses. Il faut donc l’écouter et essayer d’identifier sa vision du monde, pour mieux comprendre ses réactions. La deuxième attitude consiste alors à savoir interpréter s’il y a ou non dans son comportement un message à décoder. Du côté des adultes, le comportement est aussi émotion, message, expression de besoins contradictoires. Il est tout aussi important de prendre conscience de ce qui dicte l’attitude afin de ne pas en faire porter la seule responsabilité à l’enfant. Mais attention : l’écoute respectueuse des émotions de l’enfant n’implique pas systématiquement la satisfaction de ses demandes. L’aptitude à gérer la frustration, à différer une satisfaction, à subordonner le présent au futur constitue un élément fondamental de la capacité au bonheur. Pour cela, il s’agit de mieux manier la grammaire des émotions, la fluidité  émotionnelle étant garante de la santé psychique . Dans la série des émotions qui sont déniées ou non pris en compte et qui explosent tôt ou tard après avoir enflé démesurément, Isabelle Filliozat reprend, en les détaillant la colère, la peur, la joie, la tristesse, la dépression … Ainsi, de ces pleurs qui ne sont pas toujours signes de détresse : les larmes font baisser la tension artérielle, éliminent les toxines, relâchent les tensions musculaires, rétablissent la respiration et produisent un état de détente et de liberté. L’enfant ne doit pas être incité à refouler ses manifestations émotives, mais au contraire à les accepter. Il doit être accompagné en cela par l’adulte qui peut justement lui apprendre à les canaliser et à les conduire vers des modalités socialement acceptables. C’est progressivement que l’enfant va ainsi se voir doté des outils mentaux qui lui sont nécessaires pour apprendre à gérer ses affects.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°543 ■ 14/09/2000