Enfants et adolescents face au numérique. Comment les protéger et les éduquer
NAYEBI Jean-Charles, Ed. Odile Jacob, 2010, 236 p.
L’auteur se refuse à diaboliser internet qui, pour lui, peut constituer un excellent moyen de communication et d’ouverture sur le monde. Ce qui pose problème, ce n’est pas tant l’outil que l’utilisation qui en est faite. Et l’état des lieux permet de mesurer l’ampleur des risques potentiels : si 4,4% des 6-8 ans surfent quotidiennement sur la toile, c’est le cas de 70% des moins de 11 ans et de 95 % des adolescents. Les adultes n’ont pas toujours conscience des dangers encourus. Les chances, pour un enfant, d’éviter le flux d’exposition malsaine sont des plus minces. Sur les 50 sites préférés des jeunes internautes, 28% ont un caractère violent. Rencontrer des messages cultivant la haine de l’autre, proposant des recettes pour se suicider ou décrivant des rites sataniques n’est pas, à proprement parler, propice au bon développement psychoaffectif. Parmi les sites les plus fréquentés, 32 % ont un caractère hautement sexuel. La curiosité de l’enfant pour la sexualité adulte n’est pas nouvelle : elle a toujours existé. Mais, elle a longtemps servi de transition à l’émergence d’un désir partagé, à travers les premières expériences d’émoi, les regards qui se croisent, les tentatives de séduction réciproque. L’exposition brutale et continue aux images pornographiques, auxquelles 87 % des enfants et ados de moins de 14 ans affirment aujourd’hui avoir accès, prive les jeunes générations de ces temps passés à moduler, à modérer et à gérer la vie rationnelle dans sa dimension affective et érotique. Et puis, il y a la multitude de ces jeux, dont 80 % ne posent pas problème, mais qui peuvent fragiliser la frontière séparant la réalité, de sa perception virtuelle. Comment réagir et s’adapter au quotidien, quand on a expérimenté, avec succès, sur internet le sentiment d’invincibilité ou le goût de la vengeance ? Et combien d’enfants ou d’ados aux médiocres résultats scolaires, à la mauvaise image de soi et aux faibles compétences sociales y trouvent un moyen de fuir ? Les symptômes de la cyberdépendante sont connus : espace de pensée envahi par la toile, baisse de concentration à l’école, abandon de toute activité sportive ou culturelle parallèle, coupure des relations amicales et familiales, irritabilité en cas de manque d’internet, troubles du sommeil. Bien sûr, toute utilisation de la toile ne débouche pas forcément sur ces dérives. Pour les éviter, mieux vaut installer l’ordinateur au milieu de la pièce commune, limiter les connections à une ou deux heures par jour, selon l’âge de l’enfant et ne pas le laisser en tête à tête avec internet, en passant du temps avec lui, pour surfer. La meilleure prévention reste encore cette forme de vigilance adulte, qui ne se limite pas au seul code parental, conclut Jean-Charles Nayebi.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1060 ■ 26/04/2012