Fruits de l’amour ou pommes de discorde ? La place des enfants dans les couples en conflit
DENIS Catherine, Ed. Paroles d’enfants, 2012, 189 p.
Combien sont-ils ces enfants qui ne connaissent de leurs parents que les disputes, les procédures judiciaires, les agressions verbales et/ou physiques, le dénigrement mutuel ? Ce livre leur est consacré. Il nous fait d’abord entrer dans ces familles en conflit permanent où chaque adulte n’a de cesse que de démontrer l’incompétence et l’inadéquation de l’autre auxquelles il oppose ses propres capacités et aptitudes. N’arrivant pas à dépasser les blessures, les angoisses, les déceptions et la rage qui l’animent, il ne peut concevoir que son fils ou sa fille ne puissent pas haïr l’autre parent et refuser de le revoir. Dès lors, même s’il est animé du désir profond d’aimer son père et sa mère, quelles que soient les faiblesses et les fragilités qui font partie de sa personnalité, l’enfant n’a d’autre choix que de défendre le parent agressé (en s’identifiant à celui qui est victime), de prendre partie (en devenant le partenaire émotionnel de l’adulte) ou de se couper en deux (en se plaçant tour à tour et successivement d’un côté, puis d’un autre). Le voilà tour à tour médiateur, confident, messager, délateur, espion. Il développe une hyper vigilance, pour faire face à la charge agressive des adultes. Son développement peut s’en trouver compromis, perturbé, retardé. Face à cette maltraitance psychologique, la médiation familiale essaye de rétablir les fils du dialogue, tentant d’accompagner le deuil de la relation et l’émergence d’un modus vivendi portant sur la vie de l’enfant. Mais, les professionnels se heurtent parfois aux obsessions de parents qui, aveugles aux souffrances occasionnées, évitent de reconnaître la moindre faille qui ferait le jeu de l’ex conjoint. Protéger l’enfant nécessite, alors, de le resituer à une place de sujet et non d’objet de ses parents et à le décentrer par rapport au conflit parental.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1147 ■ 18/09/2014