L’intelligence du coeur - Rudiments de grammaire émotionnelle

Isabelle FILLIOZAT, Edition J.C. Lattès, 1997, 340 p.

Notre civilisation judéo-chrétienne a inscrit depuis des millénaires dans notre éducation, la méfiance à l’égard de nos émotions que nous avons toujours été invités à réprimer. Il n’est pas admis de les montrer en public ou de les avouer sous peine d’être jugé comme non-conforme. Or, « les émotions ont besoin d’être libérées. Si on les garde en soi, elles nous oppressent » (p.40). Peur, colère, agressivité sont des expressions tout à fait saines de nos sentiments. L’angoisse, la honte ou la violence constitue des réactions frustrées à ces pulsions qu’on n’a pas voulu reconnaître et accompagner. Isabelle Filliozat nous propose une véritable réhabilitation des affects en expliquant que ce n’est pas tant le raisonnement que l’émotion qui guide le monde. Accéder à la compréhension des sentiments qui nous animent, c’est apprendre à mieux gérer nos états internes et à faire le tri de nos peurs et de nos rages. L’objectif consiste bien à renforcer notre capacité à vivre ensemble. S’appuyant sur les apports de l’Analyse Transactionnelle et de la Programmation Neuro-Linguistique, l’auteur n’hésite pas à parler d’« intelligence émotionnelle » qu’elle définit comme les capacités à se motiver et à persévérer malgré l’adversité et les frustrations, à contrôler ses impulsions, à différer une satisfaction, à réguler son humeur et à empêcher la détresse d’altérer ses facultés de raisonnement. Combien nous sommes loin du compte. Il est si fréquent d’hésiter à partager son ressenti. Or, si on ne met pas de mots sur ce qu’on sent, on n’évitera pas pour autant la transmission de son état mental qui transparaîtra de toute façon d’une autre manière. Ces adultes, qui sont insensibles à eux-mêmes et à leurs enfants ont le plus souvent subi eux-mêmes l’insensibilité de leurs propres parents. L’éducation qui permet à l’enfant d’advenir en un adulte épanoui et en contact avec les autres est celle qui assure sa confiance en lui. Se sentir exister, être accepté inconditionnellement, se sentir apprécié et être autorisé à exprimer ses ressentis constituent la meilleure façon de rentrer en harmonie avec l’autre. « Les êtres humains sont des êtres de relations. Ils se nourrissent de caresses et d’attentions autant que de pain. » (p.265)

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°421  ■ 04/12/1997