Vous devriez l’emmener chez le psy

Geneviève DE TAISNE, Fleurus, 1997, 206 p.

Echec scolaire, insolence, violence, renfermement sur soi, absence d’amis... face aux difficultés rencontrées par un enfant, le recours à un psychologue constitue un réflexe de plus en plus banalisé. Geneviève de Taisne, nous  explique bien ce rôle d’accueil et d’écoute qu’ont les psychothérapeutes d’enfants, métier qu’elle exerce elle-même. Ils sont attentifs à la fois à l’inquiétude des parents, au décryptage des paroles comme du silence ou du visage de l’enfant ainsi qu’à leurs propres clignotants internes. Mais ils ne sont pas des magiciens: ils proposent un savoir sur l’inconscient et sur sa mise en acte, des techniques d’écoute et surtout le désir d’aider l’enfant et ses proches à changer. Quand on vient les trouver, on peut déposer chez eux sa souffrance et y trouver quelqu’un qui comprenne ses propres sentiments et qui aide à traverser les déserts intérieurs et extérieurs en permettant d’y tracer ses propres pistes. La façon dont se déroule la thérapie  s’adapte à chaque histoire qui est en soi unique. Pour des parents, confier leur enfant et accepter l’alliance qui va s’établir entre lui et le psychologue n’est pas chose facile. Parfois le suivi ne dépasse pas la première consultation. Parfois, il échoue très vite, l’enfant se faisant l’écho par sa propre résistance aux réticences et hostilités de ses parents trop inquiets ou jaloux. Parfois, il se termine dès l’apparition des premiers progrès. Or, « quand les symptômes les plus criants sont partis, il reste à entendre les difficultés à l’origine de la blessure et à la soigner » (p.78) L’évolution positive de l’enfant n’est pas forcément celle qui convient le mieux aux parents tant elle bouscule parfois l’équilibre familial : la souffrance est parfois liée aussi à une place difficile à tenir dans la fratrie ou à une altercation avec un autre membre de la famille. Car, l’auteur se refuse à transformer les parents en bouc-émissaires : « les enfants n’ont plus le droit d’être mauvais élève, insolent, fugueurs, sans que l’oeil de l’entourage n’en renvoie la cause aux pauvres parents qui n’auraient jamais du vivre ensemble, se séparer, permettre, gronder, exercer leur métier de parents comme ils le pouvaient » (p.8) Et de rappeler fort justement que les parents parfaits qui comblent les désirs de leur progéniture font de très mauvais éducateurs. C’est tout au contraire leurs failles, dans la mesure où elles restent raisonnables, qui permettent à leurs enfants de prendre conscience de leurs différences, de leurs besoins et désirs propres et de les adapter à une vie qui est toujours faite de compromis et de difficultés à surmonter. Vignettes cliniques, dessins d’enfant, lexique des mots barbares et réponses à des questions tout azimut viennent compléter un texte fort bien écrit et tout à fait intéressant.

 

Jacques Trémintin -  Septembre 1997