Psychologie de la connerie
MARMION François (sous la direction), Éd. Sciences Humaines, 2018, 378 p.
Si pour Descartes le « bon sens est la chose du monde la mieux partagée », la connerie est elle aussi partout, qu’elle suinte ou perle, ruisselle ou déferle. Mais, plutôt que d’étudier le con, l’idiot, l’imbécile, l’abruti ou le sot comme objet, la psychologie essaie de comprendre pourquoi ils se comportent avec une telle bêtise. Et la trentaine de contributeurs réunis par François Marmion s’y essaie avec application. Premier axe de cette exploration, son rapport à la connaissance : si le véritable expert connaît l’ampleur et les limites de ses compétences, c’est bien parce que moins on possède de savoir, plus on a de convictions et plus sa culture est étendue, plus on s’interroge. Face à un évènement, le savant doute, le sage réfléchit et le con affirme avoir trouvé la preuve du destin, de la fatalité, de la conspiration, du complot, de l’intention. Second axe, le rapport à la croyance : le con prend ses convictions pour des vérités gravées dans le marbre alors qu’elles ne sont construites que sur du sable. Le doute rend fou, la certitude rend con : à chacun son camp ! Troisième axe, le rapport à l’intelligence : s’en croire plus pourvu que les autres parce que supérieur à eux est un signe distinctif du porteur de connerie qui s’ignore. L’incapacité d’entendement n’étant pas sa caractéristique première, les deux ne sont donc pas incompatibles. Quatrième axe, le rapport à l’âge : l’enfant a un esprit ouvert et curieux qui a tendance à se refermer quand il devient adulte, la connerie se fait constante et systématique chez ce dernier. Cinquième axe, sa proportion dans le genre humain : nous sommes tous des cons en puissance. Seul contre-poison : cultiver l’esprit critique et encourager la contradiction, favoriser la prise de distance et inciter à la controverse.