Droit de l’enfance et de l’adolescence - Le droit français est-il conforme à la Convention Internationale des Droits de l’Enfant?
Guy Raymond, Litec (27, place Dauphine 75001 Paris), 1995, 383 p.
Ce précis de droit de l’enfance en est à sa troisième édition. Le premier jet date de 1980, à une époque où cette branche du droit en était encore à sa gestation. Les nombreux changements intervenus, notamment dans le sillage de la signature de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, justifient pleinement cette nouvelle version réactualisée.Le sujet est traité ici avec simplicité et méthode. C’est un véritable manuel à la consultation rapide et pratique. L’auteur, universitaire à Poitiers balaie le domaine tant du statut de l’enfant au sein de la famille que dans ses rapports avec le reste de la société. La filiation, la nationalité, l’autorité parentale, le dispositif de protection de l’enfance, la scolarité, mais aussi les aides financières permettant l’éducation ainsi que les mécanismes de substitution éventuelle en cas de défaillance parentale ... ne devraient plus être un secret pour le lecteur attentif, une fois la dernière page tournée.
Guy Raymond constate que le droit français appliqué à l’enfant constitue l’un des plus avancés dans le monde (au point d’avoir inspiré la Convention). Pour autant, il y a loin de la coupe aux lèvres: entre la réalité des textes et celle du terrain, il reste encore du chemin à parcourir. Trop souvent, la connaissance des droits et obligations reste du domaine des spécialistes. Ni les adultes, ni les enfants n’ont encore réussi à s’emparer de cet outil pour ce qu’il est: un moyen fondamental de régulation sociale.
Quant à la question de la spécificité du droit appliqué aux mineurs qu’on sait par ailleurs très controversée, l’auteur se prononce pour le « respect de l’enfant comme personne, adulte en devenir certes, mais déjà responsable de lui-même, à la mesure de sa maturité ». Et de rappeler que l’année mythique des 18 ans qui semble sectionner comme avec un couperet le statut de mineur de celui de majeur, ne correspond ni en droit, ni dans les faits à une réalité aussi tranchée.
L’accession au monde adulte se profile d’une manière bien plus progressive avec en amont dès l’âge de 12 ans les premières manifestations de responsabilité officielle et en aval jusqu’à 35 ans les dernières traces de minorité.
Ainsi, c’est à 12 ans que l’on est autorisé à assister à certains films. A 13 ans, se situe la majorité pénale: en deçà, une présomption irréfragable d’irresponsabilité rend toute sanction pénale impossible, au-delà, même si le jeune bénéficie de l’excuse atténuante de minorité, il est susceptible de subir une peine. A 13 ans encore, le jeune doit consentir au préalable à toute adoption plénière ou à un changement de nom ou de prénom. A 14 ans, il lui est possible de travailler (sous certaines conditions et avec l’accord du représentant légal). A 15 ans, c’est l’âge de la majorité sexuelle: l’adolescent(e) est libre de toute forme de relation sexuelle sans que son partenaire commette une infraction en la matière (sauf si celui-ci a autorité sur lui). A 16 ans, il peut demander la convocation du conseil de famille et y assister, réclamer la nationalité française (et ce jusqu’à 21 ans pour les étrangers nés sur le sol français), demander la francisation de son nom, conclure un contrat d’apprentissage (même s’il ne peut le signer), adhérer à un syndicat et élire Délégué du Personnel et du Comité d’Entreprise. Enfin, avoir 17 ans, permet de s’engager dans l’armée (avec l’accord toutefois du représentant légal).
Inversement avoir 18 ans n’implique pas être considéré dans tous les domaines comme tout à fait adulte. A preuve le statut d’ayant droit qui perdure à la sécurité sociale jusqu’aux 21 ans quand le jeune reste chez ses parents ou encore le bénéfice de certaines prestations familiales quand il poursuit ses études. Une protection judiciaire peut être accordée jusqu’à 21 ans. Le rattachement fiscal au foyer parental est possible jusqu’à 25 ans, là aussi en cas de situation d’études tardives. Quant au code électoral, il précise que si l’âge minimum pour être Conseiller Municipal est bien 18 ans, il est de 21 ans pour être Conseiller Général ou Régional, de 23 ans pour être député ou Président de la République et de 35 ans pour être sénateur !
Jacques Trémintin - LIEN SOCIAL ■ n°356 ■ 06/06/1996