Le travail passionné. L’engagement artistique, sportif et politique
LORIOL Marc et LEROUX Nathalie (sous la direction), Éd. érès, 2015, 346 p.
Un certain nombre d’activités professionnelles sont vécues à la fois comme un travail et comme une passion, allant bien au-delà de la simple recherche de rémunération. Ce qui caractérise le travail passionné ? C’est l’engagement, la liberté, la créativité, l’autonomie, le sens de l’action, l’exercice de l’activité comme porteur de sa propre rétribution. C’est l’incarnation plus d’une nécessité intérieure, que d’une contrainte externe. C’est la porosité des frontières entre travail et loisirs, vie professionnelle et vie privée, contrainte et plaisir, subordination et réalisation de soi. C’est l’occasion d’un épanouissement hors norme, non conventionnel et loin de la routine qui caractérise trop souvent le travail salarié. On n’exerce pas un métier pour gagner sa vie. On gagne sa vie pour pouvoir exercer un métier. Où se situe la limite entre trop et pas assez de passion dans son travail ? Le travail passionné peut se montrer invasif, colonisant l’espace domestique, débordant la vie familiale et le temps libre. L’engagement passionné peut ne pas être reconnu et gratifié à la hauteur des efforts investis constituant alors un puissant facteur explicatif de souffrance au travail. Surtout quand les normes quantitatives contemporaines font peser le risque de la désillusion. Sans compter que la valorisation de l’individualité et la glorification de l’engagement peuvent être vus comme une attente sociale de plus en plus prégnante et une forme ostentatoire d’affirmation de soi, déniant ainsi le travail dans ses dimensions statutaires, juridiques et monétaires. A la fois hautement désirable et facteur d’émancipation, quand la passion au travail est harmonieuse, elle peut s’avérer pas toujours enviable et source d’aliénation, quand elle devient excessive, en apparaissant comme seul support de reconnaissance de son identité.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1194 ■ 27/10/2016